
« En garde à vue, y a des moyens plus agréables de passer l’temps. » Eh oui, Eddy Mitchell n’a pas tort de le souligner. Mais il faut dire que certains l’ont bien cherché, tout en s’imaginant qu’ils pourraient continuer à retarder, à contourner, à subvertir, à insulter la justice. Le pire, c’est qu’ils ont des souteneurs –pardon : des supporters…
Disons les choses très simplement : lorsqu’il a été placé en garde à vue, M. Sarkozy n’a pas été traité plus mal qu’un autre citoyen français. On l’a même dispensé d’enlever sa ceinture, sa cravate et ses lacets de chaussures. Simplement, il s’est longtemps cru, comme son prédécesseur, au-dessus des lois dont il était pourtant le gardien suprême. Ça ne marche plus. Et les motifs de sa garde à vue qui ont abouti à sa triple mise en examen ne reposent pas sur du vent.
Laquais !
Néanmoins, on entend s’élever les voix de valets et de courtisanes qui crient au scandale, qui sont prêts à former des comités de défense de leur champion, qui conchient la justice française (elle les protège pourtant au-delà de toute mesure) ; qui disent que s’il ne revient pas, c’est le chaos. L’intéressé, qui s’offre une tribune nationale gratuite sur une chaîne de télé toute dévouée à sa cause, s’afflige de l’état de la France (comme s’il n’y était pour rien), jure qu’il a pour seul but de la servir et qu’il veut revenir aux responsabilités dans ce but.
L’alternative est très simple : soit les idolâtres qui chantent ses louanges ne croient pas ce qu’ils (elles) disent et cherchent seulement à se placer, au cas où Sarkozy nous ferait le coup des Cent jours ; soit ils sont carrément aliénés, fascinés, ensorcelés, et il faut les enfermer. Je parle de gens qui sont élus de la République.
On a observé, à gauche, le même phénomène (certes moins marqué) par rapport à DSK. Franchement, qui peut croire qu’il ne s’est rien passé, et rien passé de grave, au Sofitel de New York ? Ce n’est pas une transaction financière à l’américaine qui peut faire passer pour blanche une affaire qui est noire, si j’ose dire. Sans compter le reste. DSK est indéfendable, il a hélas été défendu, y compris par l’ex-mari de sa désormais ex, ce qui ne manque pas de piquant.
Pour un nouvel « athéisme »
Tout cela est insupportable. Nous sommes dans un pays où des gens votent pour des personnages complètement corrompus, notoirement incapables, y compris pour des individus qui ont affiché, dans leurs relations et dans leurs écrits, des sympathies pro-nazies ; où des gens vont actuellement voir un « comique » qui s’enfonce toujours plus gravement dans l’antisémitisme explicite, réconciliant les fachos blanc-cassis et les musulmans judéophobes.
C’est cela que j’appelle de l’idolâtrie. L’idole, c’est l’entité, la statue, la vedette, l’homme ou la femme politique, transformés en Veau d’or, qu’on fait Dieu à la place de Dieu, et à qui on accorde une adoration inconditionnelle qui ne lui est pas due.
Dans l’empire romain, les premiers chrétiens étaient condamnés pour « athéisme » parce qu’ils refusaient de rendre un culte à l’empereur.
Je veux être de ces chrétiens-là. Pas question de se laisser charmer par les serpents qui se font passer pour nos sauveurs alors qu’ils ne cherchent qu’à se servir et à s’auto-protéger à nos dépens.
Sarko n’est pas à plaindre. Et j’espère, pour la République, qu’on n’assiste là qu’au commencement de ses ennuis.
Chrétiens post-constantiniens
Remarque subsidiaire : on m’a reproché d’être dur ou sarcastique avec les politiques. On me rappelle –certes opportunément– que l’Écriture stipule de prier pour les autorités en place. Sauf que ces prières ont un but « utilitaire », qu’elles ne sont pas un privilège à accorder à tel potentat du fait de sa position. Lire et méditer 1 Timothée 1… et 2.
Il suffit de lire n’importe quel prophète biblique ou de voir que Jésus qualifiait Hérode de « renard » (Lc 13.32) pour comprendre que le respect des autorités est le respect du principe d’autorité et non la complaisance à leur endroit. La prière pour les autorités n’est pas de la neutralité bienveillante. Et force est de constater que l’Église post-constantinienne, une fois passée du bon côté du manche, fait preuve depuis seize ou dix-sept siècles d’une mansuétude excessive envers les puissants de ce monde.
Jean-Baptiste disait aux soldats : « Ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort, et contentez-vous de votre solde. » (Lc 3.14). Au « renard », il reprochait ses mœurs dissolues : ce courage lui coûta sa tête.
La complaisance dont nous faisons preuve envers nos dirigeants assure à nos têtes une stabilité durable. N’est pas Jean-Baptiste qui veut…