La laïcité à l’école

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La laïcité à l’école

Cette année, un de mes fils s’est retrouvé face à un enseignant du primaire lui signifiant que le récit biblique de la création, Adam et Ève, etc., n’étaient que des historiettes pour personnes crédules… Et que la science expliquait les choses tout autrement, bien plus sérieusement. Mais quelle ne fut pas ma surprise, et ma fierté, d’apprendre qu’il lui avait rétorqué paisiblement à la fin de la classe, du haut de ses huit ans : « Maître, vous avez le droit de penser comme vous le voulez, mais vous n’avez pas le droit de vous moquer de ma foi devant toute la classe ». Bim ! Remis à sa place !

Car, c’est bien de cela dont il s’agit lorsque nous parlons de laïcité à l’école(1) : une exigence de neutralité reposant sur le personnel enseignant en tant que représentant de l’État. C’est ainsi que l’exprime sans ambiguïté l’article L.141-2 du Code français de l’Éducation :

« Suivant les principes définis dans la Constitution, l’État assure aux enfants et adolescents dans les établissements publics d’enseignement la possibilité de recevoir un enseignement conforme à leurs aptitudes dans un égal respect de toutes les croyances. L’État prend toutes dispositions utiles pour assurer aux élèves de l’enseignement public la liberté des cultes et de l’instruction religieuse ».

La laïcité à l’école n’est donc pas un nouveau catéchisme scientiste, ou une machine de guerre antireligieuse visant à nettoyer les consciences des affres de la foi, mais bien le dispositif permettant d’assurer la neutralité de l’État en matière religieuse. Ceci au service du respect des consciences et des libertés de chacun, petits et grands. Et nous devons apprendre à défendre âprement ce bien. Que nous soyons croyants ou incroyants, peu importe : il s’agit là de notre bien commun. Chacun dans l’espace de ce service public qu’est l’école a le droit au respect et à l’égalité de traitement. Ainsi, comme l’exprime un livret du Conseil National des Évangéliques de France sur le sujet :

« La discrimination n’a pas sa place à l’école notamment en matière de convictions. Un élève qui aurait exprimé dans un devoir ses opinions religieuses, philosophiques ou politiques (par exemple, contre l’avortement ou l’euthanasie, en faveur de l’anarchisme, contre le capitalisme, etc.) ne peut être ni sanctionné, ni raillé pour ses opinions(2) ».

En effet, si l’école et son personnel sont laïcs, les usagers de ce service public, eux, ne le sont pas. Les enfants n’ont pas à rougir de leur foi. Ils n’ont pas à laisser « honteusement » chez eux leur culture ou les croyances qui la constituent. Ils ont, au contraire, tout à fait le droit de partager leur conviction dans la cour de récréation au nom de leur liberté d’expression, à partir du moment où ils font l’apprentissage à l’école d’une écoute et d’un dialogue respectueux. Ils pourront même dans le cadre de cet apprentissage parler de leur religion. Dans une circulaire, le ministère de l’Éducation nationale le signifie ainsi :

« Parce que l’intolérance et les préjugés se nourrissent de l’ignorance, la laïcité suppose une meilleure connaissance réciproque y compris en matière de religions. Les faits religieux, notamment lorsqu’ils sont des éléments explicites des programmes comme c’est le cas en France et en Histoire, doivent être utilisés au mieux dans les enseignements pour apporter aux élèves les éléments de culture indispensables à la compréhension du monde contemporain(3) ».

Dans ce cadre-là, le partage de l’Histoire, des croyances et des pratiques de la foi a tout à fait sa place à l’école, à partir du moment où tout cela se vit dans un climat d’écoute, de respect de la liberté de chacun et de dialogue. C’est ainsi que cet apprentissage d’un vivre ensemble paisible et respectueux de chacun commence et doit commencer. Et c’est sans doute là la première vocation de l’école : former à la citoyenneté et à la liberté des petits d’hommes appelés à vivre ensemble. Alors, si on s’y mettait ?

Auteurs
Erwan CLOAREC

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1.
Nous parlons ici du cadre de l’école publique en France. Dans l’enseignement privé, le cadre de la laïcité ne s’applique pas avec la même rigueur. La manifestation des croyances religieuses peut être plus libre qu’à l’école publique. L’instruction religieuse doit être facultative.
2.
Louis Schweizer et al., Libre de le dire à l’école, Marpent, BLF Éditions, 2015, p. 12.
3.
Ministère de l’Éducation Nationale, Respect de la laïcité, Circulaire N°2004-084, JO du 22/05/2004.

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