6 novembre 522. Fidelma et la Bible
« Les aventures de sœur Fidelma »
Sœur Fidelma, un membre du clergé irlandais et une juriste, est l’héroïne d'une série policière écrite par Peter Tremayne.
Peter Tremayne (le pseudonyme de Peter Berresford Ellis), est un écrivain passionné de culture celte qui après plusieurs thrillers, s'est lancé dans la série des Soeur Fidelma située au 6e siècle en Irlande et qui remporte un immense succès de part le monde.
La série exhalte un christianisme irlandais d’avant la Réforme grégorienne, un christianisme celtique célébré pour son insistance sur le sacerdoce universel, son équilibre quand à la sexualité, et sa valorisation des femmes.
Fidelma appartient au clergé celtique, à une époque où même le clergé romain autorisait encore les mariages des prêtres. C’est une juriste érudite : elle est dalaigh de « droit brehon », et instruit les enquêtes. Charge non incompatible avec le statut de religieuse.
Ses aventures commencent en 664, au milieu d’un concile orageux, à Withby, lorsqu’elle se trouve confrontée au meurtre de son abbesse. Par la suite elle résoudra de nombreuses affaires, toujours avec cet étrange mélange de logique méthodique et de soudains coups de têtes…
Fidema et la Bible
Il faut dire qu’elle est parfois un brin caractérielle, sœur Fidelma. Et elle a beau citer la Bible, elle n’est pas trop du genre à tendre l’autre joue
Fidelma connaît donc sa Bible qu’elle cite en latin ou … en anglais dans le texte de Tremayne, expédient nécessité par la rédaction d’un ouvrage dont l’action se passe si loin dans le temps. Mais Fidelma parle irlandais, naturellement.
Dans « Le pèlerinage de sœur Fidelma » (2007), son adversaire lui cite ce passage de la Bible en anglais :
« A présent, fils, écoutez-moi, prêtez attention aux paroles de ma bouche : Que ton cœur ne dévie pas vers ses chemins, ne t’égare pas dans ses sentiers, car nombreux sont ce ux qu’elle a frappés à mort et les plus robustes furent tous ses victimes Sa demeure est le chemin du shéol, la pente vers le parvis des morts ».
Fidelma, énonce alors l’origine de la citation :
« Décidément, le chapitre 7 des Proverbes, vous tient très à cœur, susurra Fidelma. Vous le mettez souvent à contribution ? »
Il y a là deux invraisemblances :
-donner le chapitre de la citation biblique alors que la division actuelle de la Bible en chapitres n'a été parachevée seulement qu'à l’aube du 13ème siècle.
-utiliser une traduction en anglais, alors qu’en 666, la Bible n’était accessible qu’en latin (Vulgate de Saint Jérôme).
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Le christianisme celtique
Ildut (425-522) est un moine breton (soit insulaire, soit armoricain) Il est considéré comme le père fondateur du christianisme celtique, et fêté le 6 novembre.
Extrait d’un article de Matt Moury :
Si l’essor du christianisme celtique de la fin de l’Antiquité au début du Moyen-Âge demeure nimbé de mystère, tous les historiens s’accordent à dire que l’île s’est tournée vers la foi chrétienne, sans l’usage de la violence, en seulement deux siècles.
En Irlande, s’est développée une riche tradition qui mérite d’être étudiée :
Un autre rapport à Dieu
Historiquement, le christianisme celtique s’est ancré dans les grandes affirmations doctrinales de Nicée (notamment la croyance en la Trinité et l’affirmation de la double nature du Christ). L’approche celtique peut être qualifiée d’holistique puisqu’elle ne cantonne pas Dieu aux lieux de culte. Le Dieu trinitaire, Créateur de l’univers visible et invisible, dépasse de loin tout ce qui est imaginable ou saisissable, il est ce Tout-autre mystérieux qui échappe aux raisonnements humains et aux constructions intellectuelles. Dans le même temps, Dieu se laisse rencontrer puisqu’il peut être trouvé partout. En d’autres termes, le Dieu transcendant (au-dessus de nous) est disponible à chaque instant comme le Dieu immanent (à côté de nous). Il l’a démontré singulièrement lors de la venue de Jésus-Christ sur terre et de l’événement de la Pentecôte…
Un autre rapport à la création
La doctrine de la création découle nécessairement de la doctrine de Dieu. Dans la vision celtique, le Dieu trinitaire bon est l’auteur d’une création bonne, certes entachée par le péché mais en attente de restauration.
Le christianisme celtique, sans jamais céder au panthéisme, redonne sa juste place à la nature, avec comme appui l’Écriture, notamment les psaumes. La création est le livre de Dieu (la révélation générale), sa beauté nous invite à la contemplation de la majesté du Dieu trois fois saint.
Un autre rapport à la communauté et à la mission
Bien avant le schisme Orient-Occident et la Réforme protestante, les communautés irlandaises observaient une saine distance avec l’influence grandissante de Rome. En ce temps-là, l’Église celtique rejetait le modèle épiscopal romain au profit de structures monastiques locales proche d’une forme de congrégationalisme… Dès le 6e siècle, l’Irlande est devenue un centre intellectuel important avec une production littéraire riche, en plus d’une plateforme missionnaire rayonnant sur les îles britanniques et, au-delà, à travers l’Europe occidentale. L’Irlande, une île « de saints et de savants », a joué un rôle clé dans la survie de la foi chrétienne après la chute de Rome et les invasions barbares. Les moines celtes ont notamment recopié les manuscrits bibliques avec application.
Dans la perspective celte, mission et réflexion forment les deux faces d’une même pièce, l’intellectuel et le spirituel n’étant pas opposés mais alliés.
Chaque chrétien doit se lier avec un anmchara, un « soul friend » qui sera son référent spirituel tout au long de sa vie. Ce mentor pourra recevoir des confidences et autres confessions et devra répondre en avertissant et en encourageant son protégé.
Ce qui nous sépare...
Mais en tant que protestants, il est difficile d’y souscrire sans réserve à la spiritualité chrétienne celtique. Un grand nombre de pratiques nous séparent en effet de cette perspective, comme le culte des saints ou l’ascétisme exacerbé. Comme toujours, l’adage paulinien s’impose : « examinez toutes choses, retenez ce qui est bon » (1 Thessaloniciens 5. 21).