Yannick Imbert, Le repos des pèlerins – accueillir et vivre le sabbat du Christ, Éd. La Rochelle, Trois-Rivières Qé, 2023, ISBN 978-2-924895-61-0 – 356 pages - € 19,95.
Yannick Imbert est professeur d’apologétique et directeur de Master à la Faculté Jean Calvin (Aix-en-Provence). Il est aussi président des Éditions Kérygma, ainsi que membre de la Commission Théologique du Conseil National des Évangéliques de France (CNEF). Il a écrit plusieurs ouvrages dont une introduction à l’apologétique, « Croire, expliquer, vivre », ainsi qu’un ouvrage consacré au transhumanisme, « Le charme de l’andréide ».
Dans cet ouvrage, l’auteur nous propose un pèlerinage de trente jours à travers toute la Bible, sur le repos sabbatique qu’on trouve en Christ. Il s’agit de trente méditations, chacune étant introduite par un verset biblique : les chapitres 1-13 parcourent l’Ancien Testament, 14 à 19, le Nouveau, et 20 à 30 traitent de l’expression communautaire et apologétique du sabbat.
Son message pourrait se résumer de la manière suivante : Dieu a créé le monde, l’a béni, et par le sabbat a permis à l’homme de se trouver dans la sainteté de sa présence. Malheureusement, l’homme s’est coupé de ces bienfaits par le péché ; mais en Christ, il peut les retrouver lors de célébrations sabbatiques (qui peuvent avoir lieu le dimanche) en écoutant la Parole de Dieu et en participant aux sacrements. Par cet esprit sabbatique, l’homme est affranchi de la tyrannie et de l’aliénation du travail ; il n’a plus besoin d’activisme ou de consumérisme pour se valoriser et retrouver son identité : il retrouve sa véritable vocation divine, dans le repos de Dieu. Concrètement, cela se traduira par une action en vue de la sauvegarde de la création, avec une dimension sociale, dans l’aide aux pauvres, aux défavorisés, aux immigrés, etc, et par la louange du Créateur.
Parmi les points qui m’ont particulièrement intéressé, je relèverai :
Le sabbat et le temple sont équivalents, un espace-temps saint où l’on peut rencontrer Dieu. Notons qu’à la p. 134, il fait deux fois une référence au Lévitique (16) alors qu’il faudrait lire Exode.
L’une des conséquences de l’oubli du repos sabbatique est l’angoisse (parfois source de violence) dans laquelle vivent beaucoup de nos contemporains - notamment à cause les réseaux sociaux, leur identité étant fondée sur ce que les autres disent d’eux et non en Christ.
L’incarnation de Jésus amène une nouveauté : dans l’AT, la sainteté du temple et dz sabbat devaient être protégés de la contagion de l’impureté ; dans le NT, c’est la pureté de Jésus qui est contagieuse et qui purifie les lépreux, par exemple. De même la sainteté du jour du repos dans la nouvelle alliance déborde sur le reste de la semaine (p. 283) par l’amour, le travail, etc.
Aux pages 319ss, il met en évidence la distinction que fait l’AT entre le ger, un étranger qui s’installe en Israël et qui a des devoirs et des responsabilités (pas de blasphème) et le nekar qui est de passage, qu’on doit accueillir et aider. Cela donne des pistes de réflexion pour notre politique d’accueil des réfugiés.
J’ai eu l’impression que l’auteur s’appuyait plus fréquemment dans ses exégèses sur les travaux de systématiciens (souvent anglophones) que sur des exégètes - mis à part Calvin, fréquemment cité ! Ainsi, Imbert relie à plusieurs reprises l’idée de saint/sainteté à celle de séparation/mise à part. Cette interprétation, remontant à une lointaine antiquité et répétée par des générations d’historiens des religions et de prédicateurs, est aujourd’hui sérieusement remise en question par la masse des textes moyen-orientaux découverts depuis 150 ans(1).
Le « repos des pèlerin » est un livre intéressant qui stimulera la réflexion sur un thème biblique important, mais rarement abordé.
Alain Décoppet