14 mars 1590. Guillaume du Bartas (1544-1590)
Né en 1544, à Montfort, en Gascogne, Guillaume de Salluste, seigneur du Bartas est issu d'une famille de commerçants enrichis et de noblesse récente, très attachée à la terre. Ses premiers essais poétiques furent couronnés aux Jeux floraux de Toulouse en 1565. La reine de Navarre, Jeanne d'Albret, commande à ce fidèle de la cour le sujet de son premier grand poème épique, La Judith, qui ne parut qu'après la mort de la souveraine dans le recueil intitulé la Muse chrétienne (1567).
Il n'entre réellement dans la vie publique qu'au retour de captivité du roi Henri en 1576, et sera dès lors employé à ses côtés à des missions diplomatiques.
Il prend part aux guerres de religion. Il est blessé à la bataille d’Ivry (14 mars 1590).
Du Bartas s’éteignit à Mauvoysin le 28 août 1590.
Deux vers extraits de la Semaine ou création du Monde (livre I, vers 83 et 84) peuvent servir de devise à Du Bartas :
« Ainsi côtoie la rive ayant la Foi pour voile,
l’Esprit saint pour nocher, la Bible pour étoile. »
Mais la gloire de Du Bartas reste surtout attachée à son Oeuvre littéraire. Il s’est particulièrement illustré dans la poésie scientifique, encyclopédique avec «La première semaine» ou Création du monde (1578) et La Seconde Sepmaine (1584).
La Première Sepmaine lui apporte la renommée.
Ce chef-d'œuvre de la poésie scientifique est un ouvrage didactique et descriptif directement inspiré de la Bible. Il évoque en sept jours et sept chants, calqués sur l’ordre de la Genèse, la création du monde et de l’homme. C’est l’occasion pour le poète de multiplier, en plus de six mille vers, les références érudites, les métaphores audacieuses et baroques, ambitionnant d’offrir un poème-encyclopédie, qui serait la somme des connaissances de son époque (cosmologie, médecine, zoologie).
Son propos est de montrer la grandeur de Dieu à travers les merveilles de la création. Usant abondamment de la métaphore, d'harmonies imitatives, de la répétition de syllabes évocatrices et de néologismes pour évoquer au mieux un objet, il est un maître du baroque littéraire.
Jusqu'en 1630 environ, Du Bartas est un des poètes les plus admirés. Puis les connaissances évoluent, et l'inspiration biblique et le style baroque sont rejetés au milieu du XVIIe siècle, en marche vers le classicisme. Il faudra attendre le début du XXe siècle pour qu'il soit à nouveau apprécié à sa juste valeur.
... Bien que par le péché, dont notre premier père
Nous a bannis du ciel, la terre dégénère
De son lustre premier, portant de son Seigneur
Sur le front engravé l'éternel déshonneur ;
Que son âge décline avec l'âge du monde ;
Que sa fécondité la rende moins féconde,
Semblable à celle-là dont le corps est cassé
Des tourments de Lucine, et dont le front lassé
D'avoir de ses enfants peuplé presque une ville,
Épuisé de vertu, devient en fin stérile :
Si fournit-elle encore assez ample argument,
Pour célébrer l'auteur d'un si riche ornement.
Jamais le gai printemps à mes yeux ne propose
L'azur du lin fleuri, l'incarnat de la rose,
Le pourpre rougissant de l’œillet à maints plis,
Le fin or de Clytie, et la neige du lis,
Que je n'admire en eux le peintre qui colore
Les champs de plus de teints que le front de l'aurore,
Qui, quittant des poissons le tempétueux séjour,
Conduit, avant-courrière, en Indes un beau jour,
Ou de l'arc qui promet aux plaines altérées
D'arroser leurs seillons de fécondes orées...