« Que le mariage soit honoré de tous, et le lit conjugal exempt de souillure » (Hébreux 13.4).L’auteur de cette épître aux Hébreux souhaite très certainement renforcer une valeur que ses destinataires chérissaient déjà. Les Juifs, comme les chrétiens, considéraient en effet le mariage comme faisant partie du dessein de Dieu pour l’humanité (Genèse 2.24). C’était aussi le cas de bien des gréco-romains. Même s’il pouvait y avoir des exceptions (jusque dans les Écritures), la fidélité à l’engagement marital, plutôt que le divorce, était fortement encouragée. Ainsi, si l’auteur enjoint ses destinataires à honorer le mariage, ce n’est pas pour les convaincre de l’importance de le faire, mais davantage parce qu’il sait combien il est utile de se soutenir mutuellement dans ce projet. Il sait combien il est plus aisé de ne pas le respecter que de l’honorer.Pareillement, en exhortant ses destinataires à garder le lit conjugal exempt de souillure, l’auteur présuppose que ceux-ci reconnaissent que seules les relations sexuelles au sein d’un couple marié sont acceptables devant Dieu. Mais là encore, les encourager de la sorte, c’est reconnaître qu’il est plus aisé de salir que de garder propre… Le soutien de la communauté de foi ne doit pas être sous-estimé.Force est de constater que les mentalités ont bien changé en 2000 ans, dans et en dehors de l’Église…En fait, il y a encore quelques décennies, la plupart des occidentaux auraient été d’accord avec les propositions suivantes quant à la conjugalité :
- La monogamie, fidèle et pendant toute la vie, est un idéal à rechercher,
- La sexualité pré-maritale, ainsi que le concubinage, doivent être découragés,
- L’hétérosexualité est la norme.
Mais, aujourd’hui, toutes ces propositions prêtent à controverse. Ou plutôt, elles ne prêtent déjà plus à controverse, étant chacune globalement rejetée comme « ringarde et dépassée ». Ainsi, face à une société et à une famille en pleine mutation, l’Église doit faire face à de nouveaux défis théologiques, éthiques et pastoraux… Les nombreux débats nationaux récents relatifs à l’introduction de nouvelles formes de conjugalité dans la loi française, par exemple, n’ont pas manqué de secouer une Église qui ne s’était pas forcément bien préparée à de telles échéances. De fait, aujourd’hui dans nos Églises, il ne s’agit plus simplement de renforcer des valeurs communes ou de s’encourager au soutien fraternel dans la fidélité à ses valeurs. Il s’agit plutôt de convaincre les chrétiens, d’expliquer et de combattre l’influence des valeurs véhiculées par les médias et la société toute entière, jusque sur nos bancs.Voilà pourquoi la thématique de la grande majorité des articles présentés dans ce numéro concerne les nouvelles conjugalités : leur présence et réalité dans notre monde contemporain, leur éloignement des principes bibliques fondamentaux, les nouveaux défis éthiques et pastoraux qu’elles posent, etc. Mais attention, ce numéro, qui fait suite à un stage particulièrement suivi de l’École Pastorale (mars 2016), ne vise pas à nous lamenter sur les évolutions sociétales récentes. À quoi cela servirait-il ? Bien plutôt, il veut servir d’outil pour les pasteurs et responsables d’Église se trouvant bien souvent démunis dans une société et une Église en manque de repères. Dans un monde voulant décider par lui-même de ce qui est mauvais et de ce qui est bien, comment sommes-nous appelés à être chrétiens, à dire notre foi, à faire preuve de charité ?Oui, mieux connaître cette société, c’est aussi apprendre à l’aimer, en pratique, en paroles et en actes, et ce, à la suite de Dieu lui-même. Que ce Cahier vous nourrisse et vous encourage donc à la pratique de cette vertu ô combien fondamentale !
Nicolas Farelly