La tentation sectaire ? Que faire ?

Complet Les sectes

Le sectaire, c'est bien évidemment toujours l'autre! et c'est heureux pour nous. Mais même quand il en est ainsi nous avons à veiller. Nous avons tous à prendre garde de ne pas tomber car nous sommes tous exposés à la tentation (I Cor 10:12 13); aussi étonnant que cela puisse paraître aux bons évangéliques que nous sommes! Notre amour sincère pour le Christ, notre attachement à la Parole de Dieu notre notoriété d'Eglise évangélique (même lorsque nous sommes seuls a la reconnaître l) nous donne d'emblée bonne conscience. Oser se poser la question équivaut bien souvent à émettre un doute sur l'une ou l'autre de ces trois données pour nous fondamentales. Nous avons à rester lucides, à veiller sur nous mêmes et sur les Eglises que le Seigneur nous confie. Mais ne nous trompons pas d'adversaire, et avant de répondre à la question, il était indispensable de préciser le sens des mots comme cela a été fait dans la première étude. Que faire, face à cette tentation? Nous esquisserons quelques débuts de réponses, en partant de notre situation aujourd’hui en France. Nous savons qu'il s'agit d'un danger réel et qu'il est de loin préférable de prévenir plutôt que de devoir guérir.

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La tentation sectaire ? Que faire ?

I Notre situation : Eglise en France aujourd'hui

1. Un état de droit :

L'article 10 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen stipule que "Nul ne doit être Inquiété pour ses opinions même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public".

Il est de la responsabilité de l'état d'assurer à chacun le libre exercice de la religion qu'il a choisie. L'article 2 de la Constitution de 1958 précise ainsi que la France, République laïque "assure l'égalité devant la loi des citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion" et qu'elle "respecte toutes les croyances".

Le régime juridique des cultes est défini dans la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Eglises et de l'Etat. Les articles 1 et 2 précisent que "La république assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes. Elle ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte".

Voilà le code juridique dans lequel se déploient nos convictions et nos pratiques évangéliques. Liberté de conscience et liberté de culte. La loi cadre essentiellement les structures juridiques de nos associations et de nos cultuelles se refusant et c'est très bien ainsi de porter une quelconque appréciation sur l'objet de la foi ou des croyances. Voilà le droit qui rend compte de la conception française de la laïcité.

2. La liberté de culte :

Les baptistes sont depuis leur origine attachés à la séparation entre le pouvoir temporel et la religion et à la liberté de culte pour tous.

Parce que Dieu a choisi de n'utiliser que la puissance de son amour pour Inviter l'homme à lui rendre un "culte raisonnable (Rom 12: 1), Il nous paraît contraire à cette révélation que l'homme utilise ses pouvoirs pour contraindre en matière de foi religieuse.

Autant nous souhaitons être respectés dans notre foi, autant nous nous devons de respecter les autres croyances. La liber té de culte est une et Indivise.

Cela signifie que nous sommes, par conviction, pour la liberté de culte et pour la laïcité de l'état. Il ne nous appartient pas, bien au contraire, de mettre en question le droit à l'existence des croyances qui ne sont pas les nôtres. Nous réclamons cette liberté pour nous et pour tous.

3. Notre situation : Eglise évangélique baptiste

a) Vigilance quant au contenu de la foi.

Redisons le avec force dans ce contexte, nos convictions d'abord chrétiennes, puis protestantes, évangéliques, et baptistes restent entières. Loin de nous l'idée que toute croyance est bonne et que toutes se valent. Nous avons une responsabilité de vigilance dogmatique. Celle ci s'exerce à notre endroit. Malheur à nous si nous négligeons de veiller sur le bon dépôt (I Tim 6:20) de notre foi.

En tant que Fédération des Eglises Evangéliques Baptistes nous avons un devoir de vigilance envers tous nos membres quant à notre fidélité à l'Evangile et à notre confession de foi.

Notre amour pour les perdus nous presse à leur faire découvrir l'Evangile du Christ.

Notre amour pour la famille chrétienne nous conduit au dialogue dans lequel nous avons, humblement et avec conviction, à témoigner de notre façon de comprendre et de vivre notre fidélité à l'Evangile et notre compréhension de l'Eglise.

Et c'est ici qu'apparaissent des tentations sectaires auxquelles nous devons impérativement être attentifs. Notre vigilance ne se Iimite pas à la bonne doctrine, elle doit s'exercer sur notre comportement. Aucun d'entre nous n'est à l'abri, aucune Eglise ne doit se croire Immunisée. L'histoire ancienne et récente de notre monde évangélique, pour ne citer que celui là, en est la cinglante démonstration.

II Les leçons de l'histoire : des dangers bien réels

  • Région parisienne : Dissolution d'une "secte" et condamnation des responsables. Séquestration d'enfants violence détournement de fonds, etc. A l'origine: un prédicateur évangélique, une petite communauté bien évangélique...

  • Dans l'Est : Un groupe de jeunes chrétiens évangéliques très dynamiques des vrais de vrais en arrivent à penser qu'ils sont les seuls vrais chrétiens. Ils finissent pas vivre en cercle fermé. Les dirigeants, véritables directeurs de conscience décident de tout. Anciens, Ils se sentent responsables de la vie de famille de tous les membres.

  • Dans le Sud : Une communauté évangélique. Le responsable impose le nombre d'enfants autorisés aux couples qui sont membres.

Entendu plusieurs fois:

"Si vraiment tu crois, tu n'as pas à chercher un médecin tu choisis: Dieu ou la médecine".

"Tu ne dois pas fréquenter ta famille, elle n'est pas chrétienne. Ils sont du diable et ne t'apportent rien de bon".

"Investissez dans le Seigneur (apportez vos dîmes et offrandes) et le Seigneur vous bénira. Malheur à qui refuse d'apporter ses offrandes, voyez Ananias et Saphira!"

"Si tu quittes ton Eglise tu te livres à Satan".

Arrêtons là cette lecture de l'histoire dont nous n'avons retenu que les cas extrêmes, et remarquons bien qu'il s'agit de dérapages dans notre famille évangélique.

Ne nous contentons pas de déplorer et de condamner de telles pratiques. Sachons en retenir l'avertissement de tentations bien réelles et l'exhortation renouvelée à la vigilance. Car dans leurs débuts, ces chrétiens, ces Eglises étaient bien évangéliques et n'avaient pas de "tares" particulières. Ignorer ou mépriser de tels dangers nous rend d'autant plus vulnérables, quoi que nous en pensions. Hier comme aujourd'hui. l'absence de vigilance, quant au contenu, mais aussi, quant au comportement et aux pratiques de la foi continuera à produire, des fruits désastreux.

III Que faire ? : la vigilance - la prévention

Dans la majorité des cas, les dérapages ont commencé par un repli sur soi du responsable et de la communauté. Les relations avec les autres Eglises, avec les collègues sont devenues lointaines et finalement inexistantes. Aucune critique n'est plus acceptée. Tout est spiritualisé. L’autorité et surtout le pouvoir du ou des responsables sont quasi absolus. Toute Insoumission aux règles du groupe devient un refus d'obéissance au Seigneur.

La meilleure des préventions c'est la communion, un des quatre piliers sur lesquels se construit la communauté (Act 2:42). Aussi Importante que l'enseignement, la prière et la Cène. La communion, avec le Seigneur doit se vivre dans la communion avec les frères. Accepter d'écouter les conseils, les remises en cause d'un frère, d'une soeur, est un signe de maturité spirituelle. Pierre s'est fait reprendre par Paul (Gal 2:11). La soumission les uns aux autres est fortement conseillée par le même apôtre Paul (Eph 5:15 21) qui nous invite à veiller sur notre conduite.

Quelques règles de sagesse concrètes :

a) Vis à vis de soi même :

  • Eviter la solitude dans l'exercice d'un ministère. Choisir au moins une personne si possible en dehors de la famille pour avoir un regard fraternel extérieur sur la façon d'exercer ses responsabilités.

  • Rester toujours attentif aux conseils, voire aux critiques des frères et soeurs. Les entendre et rechercher le bien fondé de ces réactions.

  • Etre à l'écoute du conseil de l'Eglise et de toute l'Eglise.

  • Cultiver les relations avec les collègues, de la ville et de la région (baptistes, évangéliques, réformés, etc.). Rencontrer aussi ceux qui ne nous ressemblent pas.

  • Participer activement aux pastorales locales régionales, nationales, comme au congrès (pour la FEEB).

  • S'engager dans quelques lieux de service au delà de l'Eglise locale (comité, commission, conseil, équipes ... ).

  • Veiller à une évaluation du ministère par l'Eglise niais peut-être aussi par d'autres frères et soeurs ; la Commission des Ministères par exemple.

b) Vis à vis de l'Eglise :

  • Dans l'Eglise la voix de tous les membres doit être sollicitée et écoutée.

  • Veiller à avoir un conseil d'Eglise hétérogène (tout comme l'Eglise). Recherchez l'unité et évitez l'uniformité.

  • Ouvrir l'Eglise au contact avec les autres Eglises locales et avec la région. Il est bon que les membres d'Eglises rencontrent les membres d'autres Eglises. Pour la Fédération des Eglises Evangéliques Baptistes, la vie régionale n'est pas un luxe, niais une nécessité. Il faut en être convaincu et il faut en convaincre les autres.

  • Accueillir les "visiteurs fédératifs". Ce regard extérieur régulier que nous essayons de mettre en place dans la Feeb pour toutes les Eglises. Son but, c'est qu'après la visite sur place, nous puissions ensemble rendre grâce pour la bonne marche de l'oeuvre, être encouragé et encourager les autres Eglises. Et aussi, le cas échéant, détecter quelques difficultés et aider à les surmonter avant qu'elles ne s'aggravent.

  • Engager l'Eglise à une participation active à la vie de la Fédération. Participation aux congrès, aux conventions régionales, à la prière et au soutien régulier de l'oeuvre commune: mission, évangélisation, formation, représentation, etc.

IV Que faire ? "Veiller", la réparation, la guérison

Malheureusement, Il nous arrive, dans notre Fédération, d'être face à des situations conflictuelles plus ou moins graves, que nous n'avons pas su prévenir, ni éviter. Sans doute avons nous manqué d'attention, car bien souvent, avant que les crises éclatent, nous Ignorions tout des problèmes.

Dans un cas, c'est un groupe de l‘Eglise qui nous a écrit pour se plaindre du fonctionnement du ministère pastoral et nous avertir du risque de scission. Une autre fois. c'est le pasteur qui nous a averti d'une plainte déposée contre lui à lAssociation de Défense des Familles et des Individus par d'anciens membres de son Eglise. Il y a quelques temps, c'est par les collègues des Eglises voisines que nous avons été alertés. Tous ces cas nous renforcent dans la conviction d'une mise en place nécessaire, d'un suivi plus attentif de la vie de nos Eglises et de l'exercice du ministère. Prévenir est toujours préférable à guérir.

Mais Il faut aussi soigner quand la blessure est là. A chaque fois nous avons envoyé sur place un "groupe de sages" pour visiter l'Eglise, rencontrer le pasteur, le conseil, les plaignants et, en connaissance de cause, apprécier la situation et proposer des solutions.

Quelquefois, la gravité des accusations est sans commune mesure avec la réalité des faits. Le plus souvent, on découvre plutôt des maladresses et des Incompréhensions: une non communication.

Il arrive aussi qu'il ne s'agisse que de médisance voire de calomnies et de mensonges, et qu'en réalité, Il y a plutôt un règlement de comptes entre personnes. Parfois, ce sont essentiellement des affrontements de personnes. Mais dans certaines situations, il a fallu s'opposer à des attitudes et à des comportements qui n'étaient plus en harmonie avec l'Evangile et avec notre conception de l'Eglise.

La réparation n'est possible que si l'on accepte que toute la lumière soit faite sur la situation. La guérison commence dans l'acceptation du regard attentif extérieur et de l'écoute de la parole qui peut être dite dans cette situation. La guérison est toujours un cheminement. Elle est marquée par des étapes d'explication, de repentance, de pardon, de réconciliation.

Devant la tentation sectaire nous avons tous à veiller; sur nous mêmes et sur nos Eglises, à rester ouverts et transparents. Nous n'avons rien à cacher. En même temps et toujours nous avons à respecter la liberté de chacun.

L'Evangile rassemble dans la lumière et dans l'amour. Restons vigilants.

Auteurs
Henri FRANTZ

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