Le ton du livre est donné dès le départ :
« Chers pasteurs, chers imams, chers amis, Salamou alaykoum ! Vous êtes documentés sur l’islam et vous voyez bien le défi lancé à nos sociétés occidentales. Vos spécialistes sont tout à fait capables de démonter l’islamisme du point de vue de ses doctrines et de ses actions. Mais après ? Rares sont vos spécialistes à nous dire quoi en faire et plus rares encore ceux qui sont effectivement présents sur le terrain… »
Homme de terrain, Saïd Oujibou l’est. Tel un prophète aussi, il dénonce, reprend, provoque, avertit… et indique la voie à suivre. Il est bien conscient d’être parfois dur, mais il n’a pas à s’en excuser car il sait qu’il dit vrai. Il appuie là où cela fait mal.
Partant des attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes de janvier 2015, il n’hésite pas à dire « ce sont ces fous d’Allah qui ont réellement compris le Coran » pour ajouter que l’islam ne peut pas s’acclimater dans la République car « il n’y a pas de séparation du politique et du religieux comme le veut la laïcité ».
Vous l’avez compris, l’auteur ne fait pas de cadeau à l’islam ni aux musulmans, mais tel n’est pas le but du livre. Vient ensuite le tour des Églises évangéliques auxquelles la majeure partie du livre est destinée.
Certes, les chrétiens peuvent avoir peur de l’islam et du terrorisme qu’il génère. Nos Églises devraient du reste s’autoriser à exprimer cette crainte. Mais c’est pour mieux prendre ensuite appui sur notre foi et aller à la rencontre des autres, ceux que nous connaissons si mal et qui sont souvent moins durs qu’on ne le pense et parfois même plus mûrs pour l’Évangile.
En effet, il faut absolument refuser de traiter en masse les citoyens de confession musulmane en tombant dans une espèce d’islamofolie. D’où la question : « Quand nos institutions, nos pasteurs, nos Églises vont-ils s’approcher des mosquées ? ». Nous devons quitter notre « théologie de l’enfermement qui nous a habitués à vivre dans un jacuzzi spirituel… Nous sommes tombés dans l’inertie… Nous n’arrivons plus à aimer notre prochain, à faire les choses les plus simples », celles dont Jésus nous a parlé à travers sa parabole du « Bon Samaritain », par exemple.
Est-il juste de faire un procès à l’islam alors que nos sociétés occidentales sont totalement sécularisées ? Le problème n’est pas l’islam mais les chrétiens ; le danger ne vient pas de l’extérieur mais de l’intérieur : les chrétiens sont trop frileux et nourrissent un complexe d’infériorité.
L’auteur consacre aussi un chapitre aux « Abdel » de nos banlieues, en perpétuelle recherche d’identité puisqu’ils ne sont à l’aise ni en France ni dans le pays de leurs parents… identité que leur propose l’islam radical. C’est ensuite le tour de « Fatima ». On comprend qu’elle puisse être si facilement séduite par un discours fallacieux sur la Syrie et le djihad. Comprendre n’est pas cautionner ; c’est néanmoins l’étape indispensable pour venir en aide à ces prochains que Dieu met sur notre chemin.
Autre sujet tabou abordé : nos milieux et foyers chrétiens où l’islam frappe à la porte de nos jeunes, lesquels « mettent [un jour] un pied à la mosquée et se font avaler tout entiers ». L’auteur est bien placé pour savoir que le phénomène est plus répandu qu’il n’y paraît. Quelle attitude adopter ? Le défi de l’islam ne met-il pas en lumière les faiblesses de notre christianisme ? Son individualisme, certes, mais aussi d’autres faiblesses que Saïd Oujibou ne manque pas de développer.
À l’inverse, que faire des musulmans qui embrassent la foi chrétienne ? Là encore, l’auteur du livre « Fier d’être arabe et chrétien » se démarque d’un certain nombre de comportements qu’il observe dans les milieux évangéliques. Il sait que c’est un sujet délicat qui requiert de notre part amour, humilité et discernement. Et d’ajouter : « Si je fais tout ce développement… c’est parce que je suis persuadé qu’il va en venir d’autres [musulmans] attirés ou convaincus par le Christ ».
Le livre se termine par deux annexes fort utiles : un « Glossaire arabo-christiano-musulman » : une cinquantaine de termes dont il précise le sens ; et un « Cours de rattrapage express » : quelques pages pour résumer l’essentiel de ce qu’il faut savoir de l’islam.
Le livre est facile à lire, rempli de formules choc qui le rendent agréable. Mais là n’est pas sa qualité majeure ni son but : il nous invite à vraiment vivre notre foi chrétienne.
Et si l’islam nous forçait un peu la main pour redécouvrir l’essentiel de l’Évangile et faire de nous de vrais disciples de Jésus ? Les musulmans nous attendent. Ils ont besoin de Jésus.