Méthode pour une éthique évangélique du conflit

Extrait Vie et gestion de l'Église

Parler d’une éthique du conflit, c’est poser le postulat selon lequel le conflit fait partie des relations normales entre les êtres humains, y compris dans l’Église, et qu’il n’est pas question de le nier ni de le refouler.

Ce qu’il faut éviter, c’est que les conflits cessent d’être des conflits d’objets pour devenir des conflits de personnes, et qu’ils génèrent de la violence. Et l’Évangile peut nous aider en cela.

Nous verrons tout d’abord des méthodes préventives, en vertu du principe qu’il vaut toujours mieux prévenir que guérir ; et nous terminerons par des méthodes curatives.

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Méthode pour une éthique évangélique du conflit

Comment prévenir les conflits au sein du conseil ?

On dit souvent que l’Église est une communauté de frères et sœurs, une famille, mais il ne suffit pas de dire cela ou même de le croire pour qu’il n’y ait plus de conflits relationnels : il suffit de voir ce qu’est une famille, ce que sont les rapports entre frères et sœurs. Dans toutes les familles, il y a toujours eu des conflits relationnels, et grandir avec des frères et sœurs, ce n’est pas nier les conflits, mais c’est se disputer et apprendre à reconnaître ses torts, à se pardonner et à se réconcilier.

Clarifier les choses

La métaphore du corps humain, développée par Paul dans 1 Co 12, doit nous permettre de mieux appréhender la relation entre le conseil et le pasteur. Cette relation de complémentarité et de communion s’appuie sur le principe, fondamental en théologie protestante, du sacerdoce universel : il n’y a ni laïc ni prêtre, il n’y a que des différences de « ministère », c’est-à-dire des différences de fonction et non, comme dans le catholicisme, des différences ontologiques entre clercs et laïcs. Mais la difficulté tient alors à la perception que l’on a des fonctions des uns et des autres, et notamment à l’ambiguïté du regard porté sur la fonction pastorale par les conseillers presbytéraux.
Il importe donc de clarifier les fonctions au sein du conseil. Il y a différentes configurations de conseils : le conseil qui met l’accent sur l’égalitarisme des fonctions où l’on va au-delà de la désacralisation du pasteur, il devient un salarié et le conseil son patron. Inversement le conseil qui cléricalise la fonction pastorale et qui va se décharger de ses responsabilités, le pasteur devient l’homme du sacré. Il est essentiel d’identifier quel type de conseil nous voulons, et ce que chacun attend des autres.

Mieux se connaître

Une deuxième méthode préventive consiste à multiplier les occasions d’interconnaissance, car de nombreux conflits se nourrissent de la méconnaissance mutuelle et de la peur de l’autre. La meilleure façon de faire connaissance consiste à s’inviter autour d’une table pour manger : partager un repas, ce n’est pas seulement s’alimenter, car dans ces circonstances beaucoup d’éléments transparaissent permettant de mieux connaître les paroissiens et peut-être d’apaiser certaines incompréhensions. On le sait, Jésus ne dédaignait pas les bonnes tables : dans les quatre évangiles, on trouve d’ailleurs plus souvent les termes « manger », « repas » ou « banquet », que « prier » ou « prière ». Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas prier… !

La prière

Un puissant vecteur de prévention des conflits est la prière. Le fait de prier pour un ennemi nous donne de ne plus le voir de la même façon par la suite, de ne plus le haïr, mais de le considérer comme un pécheur pardonné au même titre que moi. Il en est de même pour tous ceux pour qui nous prions, en l’occurrence les conseillers : il importe que le pasteur prie régulièrement pour chacun de ses conseillers, en les visualisant et en les  nommant. Il ne les percevra plus de la même façon.
 

La façon de se parler

La parole est essentielle. Parler, partager avec les conseillers, plutôt que d’être dans le non-dit, permet d’aplanir beaucoup de difficultés potentielles. Mais il y a plusieurs façons de se parler. Il faut éviter les « tu » et les mots qui enferment comme « jamais » ou « toujours » : « Tu arrives toujours en retard », « Tu ne tiens jamais tes engagements ». Il est préférable de parler en « je », mais il ne suffit pas de commencer les phrases par « je », car si je dis : « Je pense que tu es un imbécile… », cela ne résout rien ! Il convient donc de faire suivre le « je » de l’expression d’un besoin ou d’un ressenti, d’un affect : « J’ai besoin de toi », « Je suis découragé par cette situation ». De telles expressions sont beaucoup plus audibles. Mais attention à ne pas cacher un jugement derrière un affect : mieux vaut dire « Je me sens… (fatigué, respecté, bafoué…) » que « Je sens que… (tu me manipules, tu es paresseux…) ».
C’est cette manière de se parler que développe la CNV, la Communication Non-Violente, dont l’un des adages est « Cessez d’être gentils, soyez vrais ! »(1).

… et de prendre des décisions

La manière de prendre des décisions peut susciter ou, au contraire, prévenir les conflits. Il n’y a rien de plus terrible...

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1.
D’après le titre du livre de Thomas d’Assembourg, Cessez d’être gentils, soyez vrais. Éd. de l'Homme, Paris, 2001.

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