L’anglais est devenu l’idiome hégémonique du monde contemporain.
Le constat
Pour l’Académie française, « les anglicismes d’usage représenteraient environ 2,5 % du vocabulaire courant qui comprend 60.000 mots » (1).
Dans la vie quotidienne, il y a Relay, la maison de la presse des gares, et des smoothies au catalogue d’une grande marque de plats cuisinés surgelés. À la télé, un film optimiste est un feel good movie. Sans oublier sportswear, jeanslim, gloss…
Dans la vie de bureau, le globish est utilisé non-stop, à l’oral, et de plus en plus à l’écrit : on dit mail et e-mail, évidemment, mais encore brainstorming, deadline…
Dans le monde des affaires, c’est pire, on a résolument pactisé avec l’occupant. Les concepts les plus courants sont formulés en anglais : marketing, benchmark, feedback, booster, business model… Les médias portent une lourde responsabilité. Tel magazine mentionne « les nouveaux lieux trendy », telle radio publique évoque « le côté dark de la famille ».
Notons que ces expressions et mots américains ont tous leur équivalent en français (2).
Dangers
Claude Hagège crie dans le désert depuis des années : « Seuls les gens mal informés pensent qu’une langue sert seulement à communiquer. Une langue constitue aussi une manière de penser, une façon de voir le monde, une culture. (…) l’anglais est porteur d’une certaine idéologie néolibérale. Et celle-ci menace de détruire nos cultures » (3).
Emmanuel Jaffelin signale un autre danger : « Le recours aux vocables anglomorphes couperait le salarié de sa famille et de la société, en l’immergeant dans un imaginaire de pacotille censé lui donner l’impression d’appartenir à une autre famille, l’entreprise » (4).
Que faire ?
D’abord rappelons-nous qu’il y a des lois (5). Pourquoi ne pas commencer au moins par les appliquer ?
Il est vrai que ce sont les professionnels de la communication qui doivent surtout se remettre en cause. Claude Hagège (6) nous dit que les élites espéraient en adoptant la langue de l’envahisseur « en tirer parti sur le plan matériel, ou s’assimiler à lui pour bénéficier symboliquement de son prestige ». De là elles en sont venues peu à peu à se convaincre « de l’infériorité de leur propre culture... » Piège dangereux et qui fonctionne toujours !
Pourquoi toujours accuser les autres ?
C’est surtout aux locuteurs du français qu’il convient de réagir car personne ne les force à accepter l’anglicisation de leur langue ! Commençons donc par ne pas acheter un produit dont la publicité est en anglais, ne rentrons pas dans un shop, seulement dans une boutique… Car, dit Michel Serres « dès lors que les publicitaires et les commerçants auront 10 % de moins de chiffre d’affaires, ne vous en faites pas, ils reviendront au français » (7).
Et commençons par nous interdire à nous-mêmes ces paresseux tics quotidiens que sont un mail, du shopping, too much et tant d’autres…