J’avais un ami japonais qui travaillait en Bretagne depuis des années. Sa plus grande joie consistait à récolter des algues, comme « au pays ». Il ne comprenait pas que l’on fasse si peu de cas de cette richesse à portée de main, ou que ses cadeaux en nature qu’il aimait faire soient accueillis avec embarras.
De plus en plus appréciées
Les algues ont longtemps été méconnues. Peut-être parce qu’elles sont peu visibles et peu accessibles.
Souvent, le commun des mortels ne les voit que lorsqu’elles sont échouées pitoyablement en amas informes en bord de mer.
Pourtant, elles jouent un rôle majeur dans le biotope marin. Elles sont d’ailleurs utilisées depuis des millénaires, collectionnées dès le début du 19e siècle. Elles ont aussi inspiré de nombreux artistes. Déjà appréciées par les industriels pour leur pouvoir gélifiant, elles le sont aussi de plus en plus en cosmétique et en cancérologie.
Les découvertes ne font que commencer. Les algues sont en passe de devenir l’avenir d’un vaste Far West sous-marin.
N’oublions pas nos papilles
À Roscoff, deux normands d’origine ont eu la bonne idée de faire la collecte d’algues depuis 1993. Dans leur conserverie artisanale, ils les transforment en produits alimentaires, qu’ils font découvrir lors de visites-dégustations gratuites. On se régale de haricots verts marins, et de persil de la mer, que dorénavant on ne manque pas de rapporter à ses amis… reconnaissants !
Deux livres une expo
« Née parmi les algues(1) » est un très beau livre jeunesse qui nous apprend, par exemple, que les scientifiques qui étudient les algues s’appellent les phycologues, ou que les amateurs de fourrure ont bien failli faire disparaître des algues brunes américaines. À travers ce livre documentaire accessible dès six ans, Line Le Gall, phycologue au Museum, suit les traces d’une jeune pieuvre femelle née dans une forêt d’algues. C’est l’occasion de découvrir les algues dans différents paysages sous-marins et les créatures marines qui vivent avec et grâce à elles.
L’auteure est également la commissaire d’« Algues marines », la nouvelle exposition de l’Aquarium tropical du Museum d’histoire naturelle, dont le livre est la continuation(2).
Line Le Gall révèle toute la beauté des algues dans un autre ouvrage, « Algues, étonnants paysages(3) ». Elle y propose une plongée historique, scientifique et artistique au cœur des étonnants paysages sous-marins. Étonnant est bien le mot. Car, comment écrire le contraire devant une forêt de laminaires qui peut atteindre près de 40 mètres (soit un immeuble d’un peu plus de dix étages) ? L’album se termine par une invitation à protéger ces ressources si précieuses.