Quand les faits contredisent les discours

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Quand les faits contredisent les discours
J’ai accompagné à quatre reprises Marika à la préfecture pour sa demande d’Admission Exceptionnelle de Séjour (AES).

De déconvenues en espoirs déçus

À chaque fois, même scénario. Il faut arriver la veille vers 22h00, camper toute la nuit sur le trottoir. Vers 7h30, la police filtre les entrées vers un serpentin d’attente jusqu’à l’ouverture du tourniquet à 9h00. À deux reprises, Marika placée 70e et 60e dans la file de 200 personnes, n’y a même pas eu accès car, il n’est accordé que cinquante numéros AES.
Enfin, la quatrième fois semble la bonne. Marika a constitué son dossier de 500 originaux et autant de copies (coût 140 €) en triant ses documents par catégorie (école, impôts, CAF, formation, divorce…).Elle apprendra bien plus tard qu’elle aurait dû les classer par trimestres et non par catégories.

Coup de grâce au guichet

La guichetière examine les documents prioritaires puis demande ceux de 2016 à 2019. Elle souligne que 2016 est peu garni. Elle traque la moindre faille : une trace de correcteur blanc, une date devenue caduque…
— Et les formations, votre mode d’intégration ?
— C’était en 2011, 2012 et 2013, regardez ces dossiers très épais.
— Ça ne compte pas, on s’intéresse aux cinq dernières années.
— Mais alors tout ça ne sert à rien ?
— Le dossier est trop léger, on ne peut accepter.
La guichetière appelle le suivant.
Une rage blanche étreint Marika. Moi-même je n’en peux plus. Ce n’est pas pensable : tout ce dossier, toutes ces attentes, tout cet argent, tout ce temps, toute cette énergie et cette fatigue… Tout ça pour RIEN !

La vérité qu’on nous cache

Dans l’entrée, j’aperçois l’avocate croisée à l’arrivée. Elle nous confirme que ce n’est pas la qualité du dossier qui est en cause, mais bien le rejet des Africains par l’administration. Elle m’invite à écrire au Préfet pour dénoncer cette façon dégradante de traiter les gens. J’apprends alors que ce ne sont pas seulement les premières demandes qui sont traitées avec une telle inhumanité, mais aussi un renouvellement de carte de séjour, voire même un simple changement d’adresse.
Est-il admissible de faire dormir tous ces gens dehors, par tous les temps, de leur faire perdre des journées de travail, parfois même leur emploi ? Même ceux qui ont un travail depuis des années ne peuvent renouveler leur titre de séjour et sont menacés d’expulsion. Ils doivent démissionner, comme Abdoul, et entrer dans l’illégalité.

Politique inavouable

Et que dire de la France qui, pour honorer en façade sa réputation de pays des Droits de l’homme, n’en exclut pas moins des résidents étrangers qui participent à sa vitalité ? Ou qui empêche des étudiants, telle Sara, de finaliser leur diplôme avant leur retour au pays d’origine ?
Le refus délibéré de titre de séjour semble être fait par une administration aveugle qui ne fait aucune distinction de l’activité ou de la durée de présence sur le territoire, et qui inflige à tous un traitement dégradant en tout temps et par tous les temps.

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