Fini la débauche

J’ai remarqué que ma vie se résumait en sept chapitres, un chapitre tous les cinq ans. J’ai 35 ans aujourd’hui, le déroulement sera donc facile à suivre.

Ma mère, qui est algérienne, est venue s’installer à Marseille en 1986. Je suis né cette même année. Ma vie est tout à fait correcte jusqu’à cinq ans.

J’effectue mon premier voyage en Algérie pour rencontrer mon père et ma sœur que je n’ai jamais vus. Mes parents divorcent à cette période.

De retour en France, je suis un élève plutôt turbulent et indiscipliné. Je n’apprends pas mes leçons, car personne n’est là pour me faire réviser. Ma mère est trop occupée à travailler et ma nourrice ne parle pas français.

Je redouble mon CM2. Ma mère vient de se remarier et donne naissance à mon petit frère. Nous déménageons dans les quartiers nord de Marseille, là où ça craint.

Comme la majeure partie des jeunes qui m’entourent, je me mets à fumer des cigarettes. Puis, les premiers joints de cannabis suivent. Je connais des trafiquants de drogue, des voleurs de voitures, des bagarres entre gangs, des criminels. L’appât du gain n’a pas de limite dans ces tours. Les vies humaines n’y ont aucune valeur.

J’en veux à la terre entière de vivre danscet endroit, mais j’en veux surtout au dieu que ma famille musulmane m’a fait connaître, un dieu de terreur. Alors, je lui tourne le dos, enfin libre de faire ce que je veux. Je deviens athée et fier de l’être.

Je viens de quitter la cité pour m’installer avec ma copine. L’alcool fait son entrée fracassante dans ma vie. Je connais les soirées endiablées dans les boîtes de nuit et la perte de soi quand on est bourré à 5 h du matin. J’ai une force décuplée quand je suis saoul. Je peux me battre contre n’importe qui, je n’ai peur de personne.

J’introduis la cocaïne dans ma vie, cette poudre que l’on sniffe et qui fait rêver que l’on fait le tour le monde.

Mais ce n’est pas suffisant, il me faut encore plus de fêtes, plus de femmes, plus de drogue, plus d’alcool, plus de cannabis… Alors je quitte tout pour partir à Londres. Je peux enfin faire ce que je veux tout en restant incognito. Je prends des drogues aux noms parfois douteux comme l’ecstasy, la MDMA, le LSD, le speed, la kétamine… En même temps, je deviens expert en bière.

Je ne crois pas en Dieu, mais je l’insulte régulièrement de m’avoir mis au monde, je lui en veux de me faire autant souffrir.

Je vois bien que je brûle de plus en plus et que je marche tous les jours sans aucun objectif. Je décide alors de revenir en France et d’habiter à Paris.

Je ne sais pas ce qui me prend, mais je suis obsédé par l’idée de faire un voyage à vélo. J’en achète un et prends la route un matin de printemps. Je mets le cap sur le Mont Saint-Michel. Pour la première fois de ma vie, je passe une semaine sans fumer. Mes idées sont claires, il n’y a plus de voile devant mes yeux. 350 km plus tard, j’arrive au Mont Saint-Michel. Je fais quelques mètres à l’intérieur, mais à la vue de tous ces touristes qui courent partout, je fais demi-tour. Je passe la nuit dans un coin. En partant le lendemain, je m’arrête pour regarder une dernière fois le Mont Saint-Michel.

C’est à ce moment-là que je ressens une sensation que je n’ai jamais connue. Je suis incapable de bouger, mes membres sont paralysés, mon corps est figé, j’ai froid et chaud en même temps. Je ne suis plus maître de rien. Je pleure de joie et de tristesse, et je reste dans cet état pendant cinq minutes. Après avoir récupéré mes esprits, je rentre à Paris à vélo. Je reprends ma vie là où je l’ai laissée.

J’ai un ami qui parle sans cesse de Jésus : Jésus par-ci, Jésus par-là. Il n’a que cela à la bouche : Jésus, Jésus, Jésus... Un jour, alors que je suis bourré pour la énième fois, je vais le voir et lui raconte ma difficulté pour arrêter de me droguer. Il me répond simplement : « Tu as demandé à Jésus de t’aider ? » Je lui ris au nez ! Il insiste : « Demande-lui et tu verras ! » Je vais finalement acheter une autre bière.

En rentrant à la maison, je repense à ce qu’il m’a dit : pourquoi ne pas tenter ma chance ? Alors, je me mets à genoux et je dis : « Jésus, si tu existes vraiment, viens me délivrer et redonne-moi ma liberté. »

De jour en jour, ma vie s’améliore et je retrouve la joie de vivre. Je dors comme un bébé, les cigarettes ont un goût amer et les femmes ne m’intéressent plus. Je suis heureux de vivre, tout simplement.

C’est le soir, je suis allongé dans mon lit quand tout à coup, je ressens exactement les mêmes symptômes que quelques mois plus tôt devant le Mont Saint-Michel… Je suis de nouveau paralysé et je sens une présence dans mon appartement. Alors je lève les yeux et je vois Jésus devant moi. Il se tient près de mon bureau et me regarde avec un regard apaisant. Il me dit à plusieurs reprises : « Tu m’as oublié. Je suis le Fils de Dieu, je suis la vérité, je suis l’amour, fais-moi confiance… » Je pleure, je ferme les yeux et cette fois-ci, je comprends enfin.

Le lendemain, je me mets en route pour chercher l’église la plus proche de chez moi. Aujourd’hui encore, je me souviens de cette voix dans ma tête : « Mais que vas-tu faire dans une église, tu as vu ta tête ? T’as une tête d’arabe, ils vont se moquer de toi, fais demi-tour. »

Alors, la voix de Jésus résonne en moi : « Fais-moi confiance. » Je reprends mes esprits et j’ouvre finalement la porte de cette église. Le pasteur vient m’accueillir, mais je n’ai pas le temps de discuter avec lui, il faut que je parle à Jésus. Il m’ouvre donc la porte et me dit que je peux rester là autant que je veux. Je m’assieds et je remercie Jésus d’être venu me sauver, je lui offre ma vie et lui promets que je ne l’oublierai jamais.

Jésus savait dès ma naissance le chemin que j’allais emprunter et les souffrances que j’allais endurer. Aujourd’hui, je désire lui appartenir. Pour toujours.