Après des années d’accalmie, la mort, depuis quelques mois, rôdait à nouveau autour de notre famille. Plusieurs de nos proches avaient déjà été emmenés dans ses filets… Au début du printemps, c’est Madeleine, mon épouse, qu’elle a emportée.
Nous avions évoqué ensemble, à diverses reprises, le jour où l’un de nous partirait et, surtout, ce que deviendrait le survivant. Serait-ce elle ? Serait-ce moi ? Nous nous étions encouragés à faire face à la situation. Ce seraient, nous le pressentions, des jours et des jours difficiles. Au long des décennies de notre vie commune, les épreuves avaient, parfois, été notre quotidien. Nous étions alors ensemble, tous les deux, pour nous soutenir, nous encourager, et reprendre, la main dans la main, la route ouverte devant nous. Mais cette nouvelle marche, serait désormais solitaire, en dépit d’un heureux environnement familial. Elle nécessiterait de nouveaux apprentissages. Or, plus on vieillit, plus les leçons deviennent difficiles à apprendre !
Leçon à apprendre
Une de ces leçons m’a, très vite, été imposée dans le deuil où je me trouvais. J’avais été chargé de rédiger quelques notes bibliques quotidiennes, pour l’an prochain. Les impératifs du calendrier sont souvent impitoyables ! Sans tergiverser, j’ai dû me mettre au travail.
Mon programme comportait le psaume 66. Quelques versets, dans ma situation, ont retenu longuement mon attention, ceux qui évoquent les épreuves. L’auteur en énumère plusieurs qu’il résume, en disant : « nous avons traversé le feu, nous avons dû passer par l’eau ». C’était bien mon cas. Plus même, d’une certaine manière, le feu et l’eau étaient encore là, continuant à malmener mon cœur meurtri. La suite du texte, toutefois, ne m’a pas laissé le temps de recommencer à m’apitoyer sur mon sort. Aussitôt, en effet, dans la prière jaillit, comme l’éclair, ce constat : « mais tu nous en as fait sortir pour nous donner l’abondance. »
Aller plus près du Christ
Qu’est-elle cette abondance, dont le Christ, lui-même, parlera dans l’évangile ? (1) Peut-être pas ce que nous pouvons imaginer ! Car le don de Dieu, le Père qui nous aime, est toujours infiniment plus beau que le plus audacieux de nos rêves. Sa Parole lève, cependant, une partie du voile et souligne que ceux qui viennent à lui se mettent à vivre - ou à revivre, et que leurs fardeaux finissent par devenir plus légers. (2)
« Venez » ! dit plusieurs fois le psaume. « Venez à moi » insiste le Christ. Lorsque le chagrin se fait sombre comme un tombeau, lorsque les larmes embuent à nouveau mes yeux, lorsque la solitude se fait plus pesante, que faire sinon venir plus près de lui encore ? Ses mains, ses mains qui ont été percées par les clous de la croix, sont comme ouvertes devant moi, pleines de sa grâce, de son affection, de ses consolations.
À moi, je le sais, de recevoir, jour après jour, ce qu’il veut me donner, comme jadis les Hébreux, dans le désert, recueillaient chaque matin la nourriture dont ils avaient besoin. (3)