1. Le problème
Le regain d’intérêt pour l’étude de la Septante au cours des dernières décennies est sans contredit une bonne nouvelle pour les sciences bibliques1 . Ce corpus, souvent difficile d’approche, se trouve à la jonction de plusieurs domaines d’étude. Il est souvent étudié dans un contexte chrétien, c’est-à-dire en lien avec son emploi par les auteurs du Nouveau Testament et les pères de l’Église, et particulièrement pour son vocabulaire qui est repris par ceux-ci. Pendant longtemps, la Septante fut aussi étudiée pour son apport à la critique textuelle de l’Ancien Testament. Étant basée sur un modèle hébreu plus ancien que la plupart des manuscrits existants, elle est indispensable lorsque vient le temps de reconstituer l’histoire du texte hébreu. La révolution qu’a entraînée la découverte des manuscrits de la mer Morte a confirmé sa valeur dans ce domaine. La Septante est aussi un témoin privilégié du Judaïsme ancien, et dans le cas du Pentateuque, une rare source d’information concernant le Judaïsme du iiie siècle av. J.-C. Elle est étudiée, par exemple, en lien avec les concepts messianiques qui auraient pu y être introduits lors de la traduction des textes hébreux. Son vocabulaire est une riche source d’information concernant son milieu d’origine, mais aussi de l’éducation et des tendances interprétatives de ses traducteurs. L’emploi de certains mots ou expressions dans un contexte précis nous ouvre parfois une porte sur leurs conceptions théologiques, et plus généralement sur l’histoire de l’interprétation du texte biblique. Au niveau culturel, il s’agit du plus ancien projet de traduction de telle envergure connu de l’Antiquité. Son étude est donc instructive à plusieurs niveaux.