17 juillet 1674. Isaac Watts

publié le 17 July 2022 à 02h01 par José LONCKE

Isaac Watts (Southampton, 17 juillet 1674 – Abney Park, Stoke Newington, 25 novembre 1748) fut un hymnographe, poète, prédicateur, théologien, logicien et pédagogue anglais.

Isaac Watts, logicien et linguiste, pasteur congrégationaliste et parolier, est le poète d’environ 650 cantiques, simples et d’une beauté réelle. Il écrivait pour des assemblées peu instruites, mais fut le premier à explorer «le territoire quasi vierge du chant d’assemblée et planta les premiers jalons d’un art que ses successeurs allaient développer et perfectionner.

Grâce à leur simplicité, leur bon sens et l’attrait immédiat de leurs mélodies, ses hymnes connurent une grande popularité au cours du réveil méthodiste et bien après cela. Le recueil "Divine Songs Attempted in Easy Language for the Use of Children" de 1715 trouva sa place à côté de la Bible dans les écoles du dimanche et dans les ménages durant des générations entières.

En théologien calviniste du 18e siècle, il célèbre la splendeur du monde crée ainsi que la grâce du Dieu de l’alliance. Il semble rester trinitaire en évitant le Déisme de son époque puisque plusieurs cantiques honorent la divinité de Jésus. Il excelle dans des cantiques d’une sobriété joyeuse s’inspirant des hymnes liturgiques de l’Apocalypse ainsi que dans les paraphrases du psautier. Quelques-uns restent célèbres puisque Watts fait de Jésus le sujet du psaume,  dont certains ont fait l’objet d’adaptations en français.

Voici une des meilleures adaptations :
“O God, our help in ages past” (1719) : « Ô Dieu, notre aide aux temps anciens » (1950), Alléluia 12-15.
La version en ALL qui suit, associe certaines strophes de Pauline MARTIN avec les strophes 6 et 7 reprises de Jules-Marcel Nicole. Encore chanté, elle n’a rien de spécifiquement chrétien, c'est pourquoi, on a ajouté une doxologie :

Ô Dieu, notre aide aux temps anciens,
Espoir des temps nouveaux,
Aux jours mauvais, puissant soutien,
Notre éternel repos.

A l'ombre de ton trône, assis,
Les tiens ont habité.
Ton bras vaillant nous garde aussi
En toute sûreté.

Avant de tailler les sommets
Et de fonder les mers,
Tu es le Seigneur, à jamais,
Seul Dieu de l’univers.

Mille ans, Seigneur, sont à tes yeux
Plus brefs qu'un soir enfui,
Plus bref que l'aube dans les cieux
Lorsque prend fin la nuit.

Le temps comme un torrent fougueux
Emporte ses enfants.
Ils passent, comme un rêve heureux
S'envole au jour naissant.

Reviens, Seigneur, viens sans tarder
Envers nous sois clément !
Fais succéder un temps de paix
Aux jours d'abaissement.

Déploie à nos yeux la beauté
De ton amour sans fin.
Viens affermir, dans ta bonté,
L'ouvrage de nos mains.

 Gloire à Dieu notre Créateur
Gloire à Jésus, Sauveur !
Gloire à l’Esprit, le Défenseur,
Ensemble un seul Seigneur !   

L’imagerie simple donne un caractère majestueux à la poésie de ce cantique. Sa force s’explique par son ton austère et sa sobriété voire sa proximité à la fois au psaume et au texte de Watts. Ce cantique perdure en Angleterre, grâce à son emploi dans des cérémonies nationales, notamment depuis 1953, le sacre de la reine Élisabeth II et des mariages royaux. L’absence de références à la foi chrétienne permet un usage dans un contexte patriotique et œcuménique voire interreligieux.
    La mélodie STE ANNE (1708) de l’organiste à l'Abbaye de Westminster William CROFT,  dans les recueils : ATG 17 et ALL renforce l’appel à la transcendance divine en face de la fragilité humaine.

Autres cantiques de Watts en français :

Non moins subtil est le cantique de Watts, chanté à Noël, « Joie sur la terre, le Seigneur est venu ». En fait, c’est une paraphrase du Ps 98. Le règne du Seigneur dans le psaume est relu comme celui du Messie Sauveur.
Joy to the World, the Lord is come” (1719); /« Réjouis-toi, voici ton Roi » Alléluia 32-37 donne la meilleure version en français, celle d’Henri Kunzler :

Réjouis-toi, voici ton Roi !
La terre a son Seigneur !
Chez vous qu’il trouve un gîte,
Qu’en vos cœurs il habite !
Le ciel, la terre en chœur, (bis)
En fête chantent sa grandeur.

Aucun péché, aucun chagrin,
Ivraie en son jardin,
N’attristeront la terre ;
Délivrée elle espère /
Que sa bénédiction, (bis)
Apporte notre guérison.

Ce cantique est resté célèbre grâce à la mélodie ANTIOCHE qui vient de Lowell MASON (1839). Elle a quelques réminiscences du Messie (1741) de G. F. HAENDEL. Les premières mesures ressemblent bien au chœur : “Lift up your heads, all ye gates”.


“When I survey the wondrous cross” (1707); / « Les yeux levés vers cette croix » ALL 33-27.
Ce cantique basé sur Galates 6,14 est « le classique de la piété protestante anglo-saxonne ».  La meilleure version en français  est sans conteste de Pauline Martin : « Quand je me tourne vers cette croix » (1950), CaDo 27.

Quand je me tourne vers la croix
Où Christ expire sur le bois   
Mon cœur blessé, rempli de deuil :
Prend en dégoût mon fol orgueil.

Qui donc pourrait calmer ce cœur
Hormis la croix de mon Sauveur ?   
Tous mes plaisirs, mes vains désirs
Je veux, ô Christ, te les offrir.

Ô vois, ses mains, de son côté
Du front d'épines couronnés   
Douleur, angoisse, amour mêlés
Descendre pour nous racheter.

Grâce à ton sang, Christ, que je vois,
Couler, flot pourpre, sur le bois   
La terre entière meurt pour moi ;
Je meurs moi-même loin de toi.

Si je t'offrais le monde entier
Ce don serait pris en pitié.   
Amour si grand, si pur, si doux
Veut  âme, corps, mon cœur, mon tout.

C’est dommage que la vaste production de Watts, notamment ses cantiques tirés de l’Apocalypse, n’ait pas connu d’autres versificateurs en français.

Watts et Lewis Carroll

Les cantiques de Watts sont entrés dans la culture populaire au point où certaines phrases survivent jusqu’aujourd’hui («un esprit oisif est l’atelier du diable») et que cent cinquante années après leur publication, Lewis Carroll pouvait encore se baser sur leur connaissance pour les parodier dans Alice in Wonderland (1865) :


How does the little busy bee                  How doth the little crocodile
Improve each shining hour                    Improve his shining tail,
And gather honey all the day                 And pour the waters of the Nile
From every opening flower !                  On every golden scale !
(I. Watts 1715: cantique XX)                (L. Carroll 1865/1962:37)

Source: Stuart Ludbrook, ouvrage à paraître

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