29 septembre 1694. Stengel, l’architecte de l’harmonie religieuse
Les constructions des églises de Harskirchen, Wolfskirchen, Weyer, Berg, Lorentzen et Oermingen sont ordonnées en 1766 par le prince Guillaume-Henri de Nassau-Sarrebruck afin de garantir l'harmonie et la paix entre les confessions catholique et protestante.
Le plus célèbre de ces édifices est la Ludwigskirche de Sarrebruck bâtie de 1762 à 1775. Le « simultaneum » est instauré officiellement par l’ordonnance royale de 1684. Cependant, les communautés catholique et protestante vivent mal ce partage forcé des églises. La cohabitation génère d’importantes tensions. Cette situation perdure jusque dans les années 1760, au moment où le prince Guillaume-Henri de Nassau-Sarrebruck et le roi de France Louis XV décident d’y remédier. En 1766, ils signent une convention régissant la construction, à frais partagés, d’une deuxième église dans les villages où les deux communautés se partagent le même lieu de culte.
L’architecte est tout trouvé : Guillaume-Henri désigne son « Baudirektor » Friedrich-Joachim Stengel (1694-1787), architecte allemand, né le
29 septembre 1694 à Zerbst, mort le 10 janvier 1787 à Sarrebruck.
Les futures églises demandées à Stengel devront être de construction solide, mais dignes dans leur apparence extérieure et intérieure ; être d’un coût de construction modeste ; enfin, être adaptées à la liturgie de la confession choisie. Pour faire honneur à la prééminence du roi de France, ce sont les catholiques qui, dans chaque village concerné, ont l’avantage de décider entre garder l’ancienne église ou adopter la future construction, après examen des plans. A Harskirchen, Wolfskirchen, Weyer, Berg, Hirschland, Drulingen, Diemeringen et Oermingen ce sont ainsi les protestants qui hériteront des églises à bâtir. Il est à noter que Stengel n’a pas directement supervisé la construction de toutes ces églises, même si dans la plupart des cas, il en a dessiné les plans. Deux de ses élèves, Dodel et Lautenmann, ainsi que ses fils, étaient le plus souvent chargés de mener à bien les travaux, et parfois dessinaient les plans d’après son inspiration.
Le premier édifice à avoir porté la « patte » Stengel date en réalité de 1750, soit avant l’accord passé entre le prince de Nassau-Sarrebruck et le roi de France. Il s’agit du temple réformé de La Villeneuve (aujourd’hui Sarre-union).
De même que l’église de Berg, ce temple illustre parfaitement le concept de Breitsaalkirche, spécialement adapté à la liturgie protestante:
-plan central rectangulaire ;
-entrée à fronton (clocher à bulbe),
-l’axe cultuel de l’ensemble chaire-autel est implanté au milieu d’un des grands côtés, les bancs des fidèles sont disposés tout autour en fer à cheval et la nef est utilisée transversalement, sans chœur ni transept, afin de favoriser l’écoute de la prédication.
La dernière église Stengel érigée dans la région fut celle de Drulingen, sous la direction de Balthasar-Wilhelm Stengel, fils de Friedrich-Joachim. C’était en 1790, à l’époque de la Révolution française ; mais le comté était encore terre d’empire. Pour quelques années encore.
La survie du protestantisme en Alsace Bossue pendant et après la guerre de Trente Ans est due certainement pour une grande part à la fidélité et au dévouement du pasteur Johann Jodocus (dit Jost) Holler (1596-1667) de Bockenheim. En 1629, il est nommé diacre dans la ville. Dans les troubles de la guerre, il trouve refuge à Strasbourg avec une partie des habitants de Bockenheim. Il revient en Alsace Bossue en 1644 avant la paix de Westphalie, et convainc un grand nombre de réfugiés à le suivre. Les souverains lorrains, pratiquant pourtant une politique anti-protestante, laissent cependant Holler en paix. Ils savent qu'il est considéré par les protestants comme un exemple. Si Holler part, les protestants partent. S'il reste, ils resteront aussi. Or, économiquement, la présence des protestants est indispensable à la région.
Il est peut-être exagéré d'attribuer la survie du comté de Nassau-Saarwerden à Jost Holler. Mais il est certain que son influence n'a pas seulement été spirituelle. Pendant quelques années, Holler desservit les communautés protestantes d'une trentaine de villages en ruines dans le plus grand dénuement avec dévouement évangélique.