Chronique d’une libération
Ce texte est le résumé de son livre « Les Murs de la Solitude ».
J’ai connu tous les enfermements. Ma vie a commencé par le plus cruel d’entre eux : un dépouillement d’identité avant même d’en posséder une. Né en décembre 1971, fils d’une mère française et d’un père ivoirien qui s’est vite évaporé, j’ai été déposé à la DDASS comme un colis encombrant. Premier mur : celui du rejet.
Du rejet à l’abandon
À deux ans, arraché à ma famille d’accueil par un père soudainement réapparu, je découvre un nouveau type d’enfermement : celui des apparences. Notre appartement en région parisienne, voisin de celui de Gilbert Bécaud, dissimule une réalité sordide.
Mon père, séducteur invétéré, nous abandonne pour l’Afrique, nous laissant dans un océan de dettes. À peine sorti d’une prison, j’en découvre une autre.
De l’abandon à la maltraitance
La « cité des 4000 » à La Courneuve devient notre refuge – ou plutôt notre nouvelle cellule. Mireille, ma belle-mère, transforme notre appartement en territoire de terreur. Elle me frappe, me séquestre dans la salle de bains pour me battre sans témoins, me cogne la tête contre les murs. J’apprends à supporter en silence, à sourire en public, à inventer des explications pour mes ecchymoses. L’enfermement le plus terrible : celui du silence imposé.
De la maltraitance à la délinquance
Pendant ce temps, Franck, mon frère, introduit dans notre logement un autre type d’incarcération : lieu de trafic, de viols collectifs, de violence. Les filles piégées n’ont aucune possibilité de fuite. Parfois, en pleine nuit, j’entends leurs sanglots étouffés. Je tends un vêtement sans oser les regarder. Comment rester humain dans cette inhumanité ?

À quinze ans, je connais ma première détention officielle. Ironiquement, la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy m’offre ce que je n’ai jamais eu : trois repas par jour, un matelas, une couverture. L’enfermement physique me paraît presque...