Je vais mourir. Au soir de ma vie, je repense au virage qu’a pris mon existence, il y a bien longtemps.
J’étais alors un jeune astronome
J’étais à l’époque membre d’une équipe de sages habitués à scruter les signes du ciel, dans la lignée des savants perses. Une nuit, alors que nous observons le ciel, une étoile isolée se met à briller avec force ; intrigués, nous consultons nos manuscrits : cette étoile indiquerait la naissance d’un roi. Tous les rois ne sont pas annoncés par les astres ! Ce roi-là devrait donc être différent.
Nous partons à l’aventure, une petite délégation de mages orientée par l’étoile. Elle nous conduit vers Jérusalem, la capitale d’Israël.
Comme c’est curieux
Nous nous adressons au roi Hérode pensant que c’est son fils qui vient de naître. Lorsque le grand intendant apprend notre présence, il accélère le protocole, et le roi nous reçoit le jour-même. Mais il ne sait rien ! Il en sait même moins que nous, savants venus d’un autre pays ! Il fait venir ses propres savants qui cherchent et trouvent, dans les vieilles prophéties, un indice : Bethléem, un village près de Jérusalem. Hérode nous convoque à nouveau, en secret cette fois, pour nous envoyer à Bethléem, avec cette consigne : « Quand vous l’aurez trouvé, revenez me prévenir. »
Encore plus étrange
Nous remontons sur nos chameaux, toujours guidés par l’étoile. Elle s’arrête au-dessus d’une auberge, un bien étrange palais. L’aubergiste nous conduit au fameux nouveau-né. Une fois nos yeux accoutumés à l’obscurité, nous voyons. Nous voyons l’enfant, ce tout petit enfant, identique à tous les nouveau-nés, mais pourtant unique. En lui brille une telle bonté ! Je ne saurais l’expliquer, mais à sa vue, quelque chose coule en moi ! C’est lui, le Roi, digne d’être annoncé par une étoile ! Je regarde les collègues : eux aussi sont bouleversés. Nous offrons alors les cadeaux prévus : métaux précieux, parfums délicats, dons royaux qui paraissent soudain dérisoires devant la grandeur de ce bébé que ses parents appellent Jésus, c’est-à-dire : Dieu sauve.
Franchement extraordinaire
Pendant la nuit, l’un de nous a une vision : le roi Hérode veut détruire l’enfant. Nous rentrons donc directement chez nous, sans retourner le voir. Sur le chemin du retour, tous, anciens et jeunes savants, nous chantons, parlons, prions, transportés d’allégresse. Nos regards ont changé, nos cœurs débordent d’une vérité et d’une joie indicibles. En arrivant, nous racontons ce que nous avons vécu, mais peu nous croient.
Je comprends mieux aujourd’hui
Notre joie a continué de briller, plus secrètement, plus intérieurement, mais fidèlement. Il y a quelques années, j’ai appris par un marchand que Jésus était devenu célèbre par ses actes de bonté et ses dis- cours de vérité. Mais les chefs religieux, jaloux comme Hérode autrefois, l’ont fait tuer. Quelle folie ! Mettre à mort la bonté incarnée ! Le marchand me rapporta aussi qu’étrangement, plusieurs avaient répandu une rumeur : Jésus serait revenu d’entre les morts. Le marchand avait un sourire narquois en me disant cela, mais moi, je me suis souvenu du nourrisson débordant de vie et de bonté. Alors, j’ai cru : Jésus est vivant !
C’est le soir de ma vie, mais dans mon crépuscule brûle la même joie qui réchauffa mon cœur autrefois : Il est vivant... Il est vivant !