Le statut du pasteur et le cadre juridique de son exercice

Complet Ministère pastoral 2 commentaires

Pasteur, un drôle de métier ! Non seulement le pasteur est soumis à un certain nombre de conditions singulières dans l’exercice de sa vocation (travail le dimanche, en soirée ; intégration de sa vie familiale, sociale et ministérielle / professionnelle ; maigreur de la rémunération au regard des responsabilités endossées, etc.), mais encore son ministère obéit à un cadre juridique complètement différent des autres professions. Dans les lignes qui suivent, transcription d’une intervention donnée dans le cadre de l’École pastorale de Massy en juin 2021, l’auteur décrypte pour nous ce cadre en nous alertant sur un certain nombre de points de vigilance.

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The Law   wesley tingey 9z9fxr 7Z k unsplash Profession : pasteur ! oui, mais avec quel cadre juridique ?

Ni profession libérale, ni employé, ni auto-entrepreneur, quel statut juridique pour le pasteur ? Ce bref article relève la particularité du cadre juridique du ministre du culte exerçant dans les Églises protestantes et évangéliques sur le plan social, fiscal et les responsabilités spécifiques liées à sa fonction.

Si la loi du 9 décembre 1905 ou le code civil évoquent bien le ministre du culte, le droit français se garde toutefois d’en donner une définition, laïcité oblige. Elle ne définit ni le ministre du culte, ni la nature de ses liens avec les associations au sein desquelles il sert. L’article 4 de la loi de 1905 indique en effet qu’il appartient à chaque culte de définir son organisation, ses structures et les activités de ses membres. Ainsi il peut exister une diversité d’approche du ministère cultuel suivant les cultes, leur doctrine et leur pratique. Devant un contentieux entre un ministre du culte et une association, le juge judiciaire devra apprécier la nature des relations, les qualifier et en tirer les conséquences juridiques.

Rappelons que la qualification juridique ou fiscale d’une situation ne ressort pas d'un choix personnel des individus, mais d'éléments objectifs liés à leur situation et à l'application de la loi, la jurisprudence et la doctrine fiscale.

S’agissant des pasteurs, on constatera donc que la jurisprudence est venue poser des critères pour situer le ministère cultuel des pasteurs en dehors des rapports du droit du travail, de l’auto-entreprise ou des professions libérales.

Parallèlement sur le plan social, le pasteur se rattache généralement, au sein du régime général de sécurité sociale, au régime dédié au culte et géré par la Caisse d'assurance vieillesse invalidité et maladie des cultes (CAVIMAC).

Sur le plan fiscal, ce n’est que par assimilation que les indemnités sont assimilées aux traitements et salaires pour la déclaration de revenus.
Enfin le droit réserve aux ministres du culte, en raison de leur position d’autorité ou de confident, des responsabilités pénales particulières, soit au titre de la police des cultes, des circonstances aggravantes ou encore du secret professionnel.

I. La qualification juridique de l’exercice du ministère cultuel

La jurisprudence sociale, dès 1913 puis de manière constante , a établi l'absence de contrat de travail pour les ministres du culte dans l'exercice de leur ministère au sein d'associations cultuelles :

« Les pasteurs des Églises réformées évangéliques de France ne concluent pas, relativement à leur ministère, un contrat de louage de service avec les associations cultuelles légalement établies : dès lors les allocations qu’ils peuvent recevoir ne constituent pas un salaire, au sens de la loi précitée. »
Cass. Civ, 24 mars 1913 « Dieny »

« La préparation du règne de Dieu sur la terre ne constitue pas, du fait de sa finalité spirituelle, une activité relevant du Code du travail, quelles que soient les modalités juridiques pratiques utilisées composant le cadre nécessaire des rapports entre l’Église Réformée de France et ses pasteurs. »
Cass Soc., 20 novembre 1986/ CA Douai 30 mai 1984.

Quant au culte catholique, dès 1950, l’article 1er de la Loi n° 50-222 du 19 février 1950 indiquait :

« L'exercice du ministère du culte (catholique) n'est pas considéré comme une activité professionnelle au regard de la législation sociale en tant qu'il se limite à une activité exclusivement religieuse. »

S’agissant des prestations d’assurance chômage, une circulaire de l’U.N.E.D.I.C n° 67-28, ordonnance n° 67-580 du 13/07/1967 indiquait également que :

« … sont également considérés comme n’étant pas liés par un contrat de travail, et se trouvent donc exclus du régime des ASSEDIC…, les ministres des cultes catholique et protestant dans l’exercice de leur sacerdoce… »

Le droit du travail ne s’applique donc pas aux ministres du culte, donc aux pasteurs rattachés à une association dans l’exercice de son ministère.

Les rémunérations perçues par les pasteurs ne sont pas des « salaires » au sens du droit du travail. Les pasteurs reçoivent des indemnités ou allocations de ministère.

Ils sont en général liés à une association cultuelle (union d'Églises ou Églises) par un contrat (accord entre les parties qui peut s’appeler convention ou cahier des charges…).

Certains contrats peuvent se rapprocher des conditions du salariat par la mention des rémunérations et avantages, des congés, des horaires et un cahier des charges, mais ne constituent pas pour autant des « contrats de travail » avec application du code du travail puisque leur objet est d’ordre spirituel et cultuel et que le pasteur a une certaine autonomie dans ses fonctions.

Des cas particuliers existent comme pour les aumôniers hospitaliers, de prison ou militaires qui peuvent être vacataires ou engagés par contrat par les services de l'État. Dans certains cas, le stagiaire en Église peut être considéré sous lien de subordination pour les tâches à effectuer. Le principe général reste que le ministère du pasteur au sein d’une association ne ressort pas du contrat de travail, mais d’un contrat sui generis, particulier dont l’objet est spirituel.

II. Le régime social du pasteur : le principe de l’affiliation à la CAVIMAC

Le Code de la sécurité sociale a prévu un régime de protection sociale des ministres du culte (art. L.382-15 à L.382-20 et R.382-56 à R.382-103).

La CAVIMAC est la caisse de rattachement des ministres du culte pour la gestion de leur sécurité sociale (ministres du culte, aumôniers, assistantes pastorales, stagiaires) qui ne dépendent pas d’un autre régime de sécurité́ sociale obligatoire, selon le principe de subsidiarité (code de la Sécurité́ sociale art. L382-15).

Depuis 2017, le code de la sécurité sociale, notamment via l’article R.382-842 a mis fin à la tolérance d’affiliation au régime des salariés (URSSAF) et permis à̀ la CAVIMAC de procéder à l’affiliation d’office des ministres du culte, si le ministre du culte ou l’Église n’y ont pas procédé d’eux-mêmes.

L’obligation s’applique dès le premier jour du mois qui suit l’entrée sur le territoire ou la nomination du ministre du culte.

Elle ne s'applique pas en cas d'exercice d'une autre activité entraînant l'assujettissement à un autre régime obligatoire de sécurité sociale.

Dans le cadre du culte évangélique, le ministre du culte affiliable à la CAVIMAC est une personne :

  • rattachée à une collectivité religieuse (association cultuelle de la loi du 9 décembre 1905 ou association de la loi du 1er juillet 1901 et de la loi du 2 janvier 1907 dont l’objet comprend l’exercice du culte évangélique ou une association de droit local en application du code civil local, articles 21 à 79 dont l’objet comprend l’exercice du culte évangélique ou à une association de fait ou à tout autre modalité juridique susceptible de mener une activité cultuelle) ;
  • en vue de l’accomplissement d’une mission de nature cultuelle ou au service du culte, qu’il s’agisse d’un poste, d’une formation, ou d’un stage (notamment poste pastoral ou missionnaire ou d’assistant pastoral, formation théologique, stage pastoral ou stage d’étude théologique…) ;
  • reconnue par la collectivité religieuse de rattachement en vertu d’une décision de l’organe compétent à cet effet ;
  • non couverte par un autre régime de sécurité sociale obligatoire, en vertu du principe de subsidiarité.

Définition fournie par le CNEF, à la demande de la CAVIMAC, 2020.

Le ministre du culte qui exerce à temps partiel dispose d’un régime particulier :

Il doit être obligatoirement déclaré à la CAVIMAC par le formulaire AFF-003 à la CAVIMAC en tant que ministre du culte.
Cependant, il sera exonéré de la cotisation maladie s’il a une activité professionnelle d’au moins une heure par mois, car il sera alors couvert en maladie par le régime des salariés.

Il ne paiera aucune cotisation lorsqu’il a une activité professionnelle (séculière) qui lui rapporte l’équivalent de 800 heures payées au SMIC par an (= 8.120 € brut/an ou 677 € brut/mois). Il est couvert en maladie et en retraite par le régime des salariés ou un autre régime obligatoire. Dans ce cas, l'association peut lui verser une indemnité sans cotisation à la CAVIMAC. Dans la mesure où il n’y a pas de cotisation obligatoire de retraite pour l’activité cultuelle du ministre du culte à temps partiel dans ce cadre, il est conseillé de souscrire un contrat d’un plan d’épargne retraite (PER).

Sur le plan fiscal, rappelons que l'association n’est pas exonérée des obligations de déclaration et de versement liées au prélèvement à la source.

L’obligation d’affiliation s’applique aux ministres du culte de nationalité étrangère et rétribués par une organisation étrangère. Dans la mesure où la personne réside en France, le droit français s’applique. En cas de non-respect de cette obligation, les collectivités devront régulariser auprès de la CAVIMAC l'ensemble des cotisations dues à compter de l'entrée en France de leurs membres. Dans ce cadre, on notera toutefois l’exception du régime du détachement (Article L111-2-2 modifié par Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 – art. 123 (V)).
Les différentes cotisations sont les suivantes :

  • la cotisation d'assurance maladie, maternité et invalidité ;
  • la contribution solidarité autonomie (CSA) ;
  • la cotisation retraite de base ;
  • la cotisation retraite complémentaire (RCO) pour les ministres du culte.

Le paiement de l’ensemble des cotisations (Part Pasteur et Part Collectivité) doit être assumé par la collectivité religieuse compétente. À la CAVIMAC, il s’agit d’un régime forfaitaire sur la base du SMIC. Les mêmes taux sont ceux en vigueur dans le régime des salariés.

Les indemnités des ministres du culte évangélique, affiliés à la CAVIMAC ne sont pas soumises à la CSG/CRDS (sauf pour un cas d’exception : le revenu tiré des activités cultuelles des ministres du culte affiliés à la CAVIMAC par une association française, mais rémunérés par une société missionnaire étrangère y est soumis).

La prise en charge Assurance maladie est la suivante :

Les remboursements et prises en charge en maladie, accident, maternité/paternité et invalidité sont égaux à ceux du régime des salariés.
Le versement des indemnités journalières (IJ) en cas d’arrêt de ministère pour maladie, maternité, paternité et adoption comme au régime des salariés en respectant une carence de 30 jours en cas de maladie (nouvelle prestation depuis le 1er juillet 2020).

Une aide au paiement des frais médicaux est prévue.

La Commission d’action sanitaire et sociale de la CAVIMAC gère un fonds de 1 000 000 €. Elle peut accorder des aides supplémentaires :

  • pour les frais médicaux mal remboursés
  • pour l’aménagement du logement d’un ministre du culte handicapé.

Notez que les assurés de la CAVIMAC ont, comme tout autre assuré social, accès à la Complémentaire Santé Solidaire (CSS) et la Complémentaire Santé solidaire (« mutuelle de l'État ») s’ils remplissent les conditions.

Rappel : Les ministres du culte ne sont pas éligibles à la prime d’activité.

Les pasteurs n’ayant pas d’activité professionnelle au sens de la loi, ne peuvent en principe pas bénéficier de la prime d’activité (Article L.842-1 Modifié par Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 – art. 57)

Pour toute information sur la CAVIMAC : www.cavimac.fr

Pour toute question plus particulière : vous pouvez contacter Ernest Strupler, membre de la commission juridique du CNEF et spécialiste de ce sujet.

III. Le régime fiscal : une assimilation aux traitements et salaires

Dès 1928, le Conseil d'État a dû se prononcer sur la qualification fiscale des revenus perçus par les pasteurs protestants et a conclu par assimilation à la catégorie des traitements et salaires.

« Les pasteurs protestants, rémunérés au moyen d'un traitement fixe déterminé d'après les statuts élaborés sous le contrôle du synode national de l'Union des églises réformées de France, par l'association cultuelle à laquelle ils sont rattachés, sont passibles de l'impôt dans la catégorie des traitements et salaires à raison de ces rémunérations. »
(CE, arrêt du 15 mars 1928, req. n° 96560, RO 5179)

Depuis, sur le plan fiscal, on constate que l'administration fiscale a fait application de la jurisprudence de 1928 aux pasteurs des Églises protestantes et évangéliques, en généralisant les critères.

Dans la majorité des cas, le pasteur évangélique exerce son ministère cultuel au sein d'une association cultuelle (Église ou unions d’Églises), ses revenus étant alors fixes et décidés par les organes associatifs. Dans ce cadre, le revenu du pasteur est assimilé aux traitements et salaires. Cette position de l'administration fiscale est par ailleurs confirmée par la direction de la CAVIMAC.

Les revenus perçus par les pasteurs qui exercent leur ministère cultuel au sein d'une association cultuelle sont assimilés à des traitements et salaires, lorsque les critères d'assimilation sont réunis :

  • un traitement fixe ;
  • déterminé par les organes directeurs de l'association cultuelle (Église ou union) ;
  • selon une procédure statutaire (conseil d'administration, assemblée générale, budget associatif).

Ainsi la rémunération du pasteur ne dépend pas de lui, mais d'une décision associative. Elle est fixe et non fonction des prestations fournies par le pasteur.

La mise en place du prélèvement à la source met à la charge de l’association à laquelle le ministre du culte est rattaché de déclarer les revenus versés au pasteur dans la bonne catégorie.

Quelques cas particuliers :

Aumônerie militaire et autres cas en lien avec l'État

Les ministres du culte qui ont conclu un contrat individuel avec l'État (chercheurs, aumôniers militaires…) sont considérés comme des salariés et doivent déclarer leur revenu comme tel.

Ministère particulier sans rattachement à une association

Si la rémunération de la personne dépend des prestations de services rendus ou vient de dons directement remis à la personne, lorsque la personne exerce un ministère particulier sans rattachement à une Église, les critères d'assimilation aux traitements et salaires peuvent alors faire défaut. Il ne s'agira alors plus d'un ministère pastoral au sein d'une Église.

L'intéressé devra alors recourir à un statut propre en tenant une comptabilité personnelle et déclarera ses revenus dans la catégorie des Bénéfices Non Commerciaux.

Revenus complémentaires ou diversifiés

Attention, si un pasteur en poste dans une association cultuelle a également une activité hors de son Église (conférences, concerts de louange, publication de livres dont il tire des revenus : prestations de service, droit d’auteur…), il lui appartiendra de faire figurer dans la bonne catégorie les revenus complémentaires reçus directement et de les déclarer lui-même à l’administration fiscale.

IV. Ministre du culte et responsabilités pénales : spécificités

La loi française, laïcité et séparation entre les cultes et l’État oblige, ne définit pas ce qu’est un ministre du culte, puisque cette notion ressort de la liberté théologique de chaque culte fondée sur la liberté de pensée, de conscience et de religion et sur l’autonomie de son organisation. Toutefois la loi attribue à cette fonction des responsabilités particulières.

Rappelons l’évidence que le ministre du culte, le pasteur, n’est pas au-dessus de la loi et donc que la loi s’applique à ce dernier, sans dérogation ou protection aucune. Au contraire, la loi identifie clairement que les fonctions du ministre du culte impliquent des responsabilités juridiques supplémentaires en raison de sa position d’autorité ou de confident.

Par ailleurs, le pasteur peut parfois être considéré comme un dirigeant de fait (lorsqu’il n’est pas déjà dirigeant de droit de l’association) et ainsi porter des responsabilités civiles et pénales à ce titre.

1. S’agissant de sa position d’autorité, deux points méritent d’être soulevés :

Le ministre du culte porte des responsabilités particulières en raison de ses prises de parole publique et de son enseignement. Cela en responsabilité pénale accrue au titre de la police des cultes, mais aussi quant aux limites à la liberté d’expression, et de façon amplifiée et démultipliée avec l’usage des réseaux sociaux et du numérique en général. Les articles de la loi du 9 décembre 1905 sur ce point sont à relever :

  • « Art 34 Tout ministre d'un culte qui, dans les lieux où s'exerce ce culte, aura publiquement par des discours prononcés, des lectures faites, des écrits distribués ou des affiches apposées, outragé ou diffamé un citoyen chargé d'un service public, sera puni d'une amende de 3 750 euros et d'un emprisonnement d'un an, ou de l'une de ces deux peines seulement.
  • Art 35 Si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s'exerce le culte contient une provocation directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de l'autorité publique ou s'il tend à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres, le ministre du culte qui s'en rend coupable est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, sans préjudice des peines de la complicité dans le cas où la provocation est suivie d'une sédition, révolte ou guerre civile.
  • Art 35-1 Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l'exercice d'un culte ou dans leurs dépendances qui en constituent un accessoire indissociable. Il est également interdit d'y afficher, d'y distribuer ou d'y diffuser de la propagande électorale, que ce soit celle d'un candidat ou d'un élu…
    Les délits prévus au présent article sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

Plus généralement, tout ce qui relève des limites de la liberté d’expression est un domaine de vigilance, notamment en ce qui concerne les propos provoquant à la haine, à la violence et la discrimination (Loi sur la liberté de la presse, 29 juillet 1881).

Des mesures de fermeture des lieux de culte et de leurs dépendances existent si les idées, propos ou théories qui y sont véhiculées, et en particulier, par le ministre du culte provoquent soit à la haine ou à la violence (art. 36-3 de la loi de 1905 – fermeture à titre temporaire) soit à la haine, à la violence, à la discrimination, à la commission d'actes de terrorisme ou font l'apologie de tels actes (art. 227-1 Code de la sécurité intérieure).

2. La position d’autorité du ministre du culte est une circonstance aggravante pour de nombreux délits d’ordre pénal.

Dans le cadre des agressions sexuelles ou de l’abus de faiblesse ou du harcèlement par exemple, cette position dominante implique des sanctions pénales plus sévères pour le ministre du culte qui a abusé de sa fonction cultuelle sur la victime.

Dans le cadre du ministère cultuel, il faudra particulièrement être attentif aux questions liées aux dérives sectaires, en particulier liées à la sujétion psychologique dans le cadre de l’abus de l’état d’ignorance :

« Article 223-15-2 Code Pénal :

Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse soit d'un mineur, soit d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.

Lorsque l'infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende. »

La mention expresse du ministre du culte dans l’article 909 du code civil s’agissant de l’incapacité à recevoir des donations ou legs consentis par des personnes mourantes vise aussi à prévenir ces cas où le ministre du culte pourrait abuser de sa position pour obtenir une libéralité d’une personne affaiblie physiquement et psychologiquement.

3. Secret professionnel

Enfin, relevons que le ministre du culte, par sa fonction de confident, est soumis au secret professionnel. La jurisprudence constante de la Cour de Cassation, dès 1810, a établi que « Les ministres du culte sont tenus de garder le secret sur les révélations qui ont pu leur être faites à raison de leur fonction ». Plus récemment, en 2002, la chambre criminelle de la Cour de cassation a indiqué « l’obligation imposée aux ministres du culte de garder le secret des faits dont ils ont connaissance dans l’exercice de leur ministère ».

L’article 226-13 du Code Pénal établit que :

« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

Les articles 226-13 et 14 du Code pénal s'appliquent aux ministres du culte, tout comme les obligations de dénonciation des crimes et des délits et des mauvais traitements et atteintes sexuelles contre les mineurs et personnes vulnérables (art. 434-1 et 434-4 Code Pénal) et l’obligation de porter assistance à personne en péril (art. 223-6 Code Pénal).

Dans les situations les plus délicates, le ministre du culte doit être vigilant pour agir conformément à la loi : garder le secret quand il le faut, décider ou non d’utiliser l’option de conscience pour signaler des faits (signaler tout crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets ou dont les auteurs sont susceptibles de récidiver ou les mauvais traitements ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne vulnérable), porter assistance à personne en péril dans tous les cas.

Pour aller plus loin :

Site CAVIMAC : https://www.cavimac.fr/.

Site Infojuridique du CNEF : https://infojuridique.lecnef.org.

Jean-Marie WOEHRLING, « Ministre du culte » in Laïcité, Dictionnaire du Droit des Religions, Paris, CNRS Éditions, 2010, pp.513ss.
« Laïcité et liberté religieuse », Recueil de textes et de jurisprudence, Paris, Journaux Officiels, pp.223ss.

Droit français des religions, Traités, Paris, LexisNexis, 2013, pp.1617ss.

Libre de le dire à L’Église, pasteurs, prédicateurs, évangélistes, animateurs enfance et jeunesse, CNEF, Marpent, BLF Éditions, 2016.

Bonnes pratiques pour lutter contre les abus sexuels. Pour une déontologie au service des plus vulnérables dans les Églises et œuvres membres du CNEF, Paris, CNEF, 2021.

Auteurs
Nancy LEFÈVRE

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Commentaires

Aline Sidonie

22 January, à 06:18

Je souhaiterai savoir si un Pasteur peut-être président de l'association de l'église ou président du bureau de l'église.

Emmanuel M.

22 January, à 17:07

Sachez que la loi française ne s'oppose au fait qu'un pasteur puisse être président de l'association cultuelle dont il dépend.
Toutefois, le plus important est de connaître le rapport particulier que cultive l'église et son conseil, voire l'union d'église dans laquelle œuvre le pasteur, sur cette question.

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