
Nous étions invités à dîner chez nos amis Muller, quand une collègue de ma femme nous invite aussi, ce même jour, à déjeuner. En arrivant, je découvre que son nom est aussi Muller et que son mari est consultant, comme moi. Il m’offre un livre qu’il a écrit sur le management. Je l’avais acheté trois semaines auparavant. Dans son entreprise, il y a deux Muller ; ils partagent tous deux le prénom Jean-Louis et sont l’un et l’autre écrivains. Voilà donc une succession de hasards. Peut-on en tirer une conclusion ? Non, c’est une question de probabilités qu’un mathématicien pourrait expliquer.
Si l’on habite en région parisienne, il est normal de rencontrer quelqu’un que l’on connaît dans le RER, le métro ou la rue. Et pas seulement en région parisienne ! Un aumônier militaire que je rencontre par hasard à Limoux m’avait rendu visite dans mon bureau parisien trois mois auparavant.
Certaines personnes cherchent à donner du sens au hasard. On peut les comprendre ; cela paraît tellement inhabituel que ça frappe l’imagination. La première raison qui pousse à donner du sens est que le hasard nous surprend. Il crée une rupture dans la banalité du quotidien, et ainsi prend un relief particulier.
La deuxième raison est que nous avons conscience que nous ne pouvons pas le créer par nous-mêmes. Si quelqu’un vous dit : « On se retrouve à Paris ; je ne te dis ni quand ni où, mais le hasard nous réunira au même moment dans le même restaurant. », je vous souhaite bon courage.
La troisième est que, quelquefois, le hasard change quelque chose à notre vie. Quelquefois en bien (si on rencontre son futur conjoint) ou en mal (si on passe sous une fenêtre au moment où un pot de fleurs en tombe).
Si « le hasard fait bien les choses », comme le dit l’adage, il peut aussi les faire très mal. Un petit livre de la bible, Ruth, nous présente une jeune femme qui va glaner par hasard dans un champ. Sa vie en sera changée, puisqu’elle épousera le propriétaire du champ, et deviendra l’arrière-grand-mère du roi David. Mais pour que ce hasard soit bénéfique, d’autres facteurs ont joué : la sagesse et les conseils de sa belle-mère, les lois du pays, l’intégrité de son futur mari, etc.
Penser que tous les hasards viennent de Dieu confine à la superstition. Par contre, de même que Dieu utilise l’intelligence de ses enfants, la raison, l’analyse, les convictions, l’organisation, il peut aussi utiliser le hasard.