Je n’ose pas toujours avouer mon goût pour la musique dite « Metal ». On me demande parfois : « Comment peux-tu aimer cette musique ? » Pour beaucoup, mon parcours professionnel (pasteur, animateur biblique, aumônier) semble incompatible avec l’écoute de cette forme musicale. Et pourtant…
Elle dit souvent la vérité
Premièrement, je l’aime parce qu’elle peut exprimer avec puissance des vérités qui m’interpellent (sentiments, interrogations, enthousiasmes…). Pas toujours, bien sûr ; mais quand je ne l’aime pas, je ne l’écoute pas. Or, quand il s’agit d’aborder des questions de vie et de mort, certaines vérités trouvent une expression plus authentique dans les hurlements du Metal que dans les harmonies d’un chant de louange. À ce titre, je trouve souvent dans l’agressivité du Metal un écho de ma colère contre contre l’exploitation des faibles par les forts, contre le mensonge qui sert à tromper les crédules, contre l’égoïsme dans mon propre cœur, contre l’incapacité des êtres humains à conjurer le malheur du monde par leurs propres forces. Même quand le Metal s’en prend à Dieu (et ce n’est pas rare), il exprime souvent des interrogations qui sont fondamentalement vraies. D’ailleurs, bien des auteurs bibliques n’ont pas hésité à formuler eux aussi. Pourquoi la violence des puissants semble si souvent emporter les faibles ? Pourquoi des enfants doivent-ils grandir dans la peur ? Pourquoi la plupart des humains connaissent un vide spirituel dans leur cœur ? Pourquoi Jésus s’est-il laissé clouer à la croix comme un vaincu ? Pour illustrer ces questions, je cite parfois la chanson de Metallica, « The God that Failed »¸ (« Le Dieu qui a échoué ») ou celle de Ronnie James Dio (qui a fait partie de Black Sabbath) « Hungry for Heaven » (« Affamé en manque du Ciel »)
Une forme de révolte souvent nécessaire
Deuxièmement, le Metal est une forme privilégiée de remise en question. Avant même de remettre en question la religion, la première cible du Metal est le « système » qui favorise les maux de la société : égoïsme, violence, racisme, exploitation des pauvres, injustice, indifférence, solitude, etc. De telles souffrances trouvent dans le Metal une expression dans laquelle les fans se reconnaissent souvent. Et quand je lis la Bible, j’observe en Jésus une colère analogue à celle du Metal contre l’injustice, par exemple quand il chasse les trafiquants du temple ou quand il traite les hypocrites religieux de tombeaux blanchis à l’extérieur mais pleins d’ossements à l’intérieur . En tant que chrétien, je sais que le « système » provient du péché que Jésus est venu éradiquer, et dont nous verrons la fin un jour, si nous plaçons notre confiance en lui. Des artistes chrétiens de Metal n’ont pas hésité à le dire (P.O.D., Demon Hunter, Mortification, Brian Head Welch, etc.)
Vraiment sans danger ?
Le Metal peut être dangereux, bien sûr. Comme une voiture, un scalpel, l’argent… Parce qu’il s’agit d’une expression artistique, il peut susciter une adhésion particulièrement forte. Dans ses utilisations excessives, incontrôlées ou stupides, ou entre les mains de personnes manipulatrices ou déséquilibrées, il est une forme de puissance qui peut faire du mal. On dira d’ailleurs la même chose du pouvoir d’un politicien, de la verve acérée d’un bloggeur sur Internet ou… de l’autorité d’un responsable religieux.
Quand on joue avec le feu…
Quand le hard-rock et le Heavy-metal ont fait leur apparition, ils étaient accompagnés d’une odeur de soufre. Des groupes comme Black Sabbath et ACDC, voire même les Rolling Stones, pour ne citer que certains des plus célèbres, flirtaient avec les forces maléfiques dans leurs textes. De manière plus évidente encore, les pochettes des disques et les mises en scènes macabres des concerts évoquaient parfois les puissances des ténèbres – diables, messes noires, symboles sataniques, etc… Il est clair que de nombreux artistes s’amusent encore à jouer avec ces thèmes. Un jeu dangereux pour les artistes comme pour les fans qui les suivent trop loin dans leurs excès.
Beaucoup de personnes s’arrêtent à la forme
Personne n’est obligé d’aimer le Metal. Ses expressions (la musique, l’attitude, le look) ne peuvent plaire à tout le monde. Certains les trouveront même incompréhensibles ou laides. De plus, elles se veulent très souvent provocatrices. Mais la provocation et la laideur sont des appréciations subjectives et ne sont pas synonymes du mal. Un tel amalgame est dangereux et doit être rejeté. S’il y a danger, il est dans le message ; il n’est pas lié à la forme. Que la forme artistique nous plaise ou pas, nous devons user de discernement dans tout ce que nous écoutons, lisons ou regardons. Je déteste certains textes du groupes Slipknot, même si la musique me plait, a priori. Leurs fans portent parfois un T-shirt avec le slogan, tiré d’une de leurs compositions : « People = shit » (« Les gens = de la merde »). Le problème se trouve dans le mensonge de ce message, pas dans leur musique. D’autres artistes du même style musical ont un tout autre message, qui peut être porteur de vérité.
Des questions spirituelles
Après les premiers temps sulfureux du rock, une évolution est apparue. Non seulement certains rockeurs, y compris dans le Metal, ont commencé à parler de leur foi chrétienne, mais il s’est levé des voix pour rappeler que les interrogations du rock sont aussi des interrogations spirituelles. On raconte que le philosophe chrétien Francis Schaeffer aurait dit : « Les années 60 ont été marquées par le “sexe, la drogue et le rock’n’roll”, mais les chrétiens ont eu tellement peur du sexe et de la drogue qu’ils ont oublié de répondre aux questions théologiques que posait le rock’n’roll. » Révolte contre le non-sens de la vie, quête du bonheur, recherche des paradis artificiels, désir de maîtriser la mort … ces thèmes sont emblématiques du rock, notamment du Metal. Ils sont aussi spirituels. Même si le Metal ne possède pas en lui-même les réponses, il est souvent, sur scène et dans le public, une tentative pour conjurer le malheur du monde. À ce titre, il peut poser de bonnes questions que toute personne ferait bien d’écouter. Elles peuvent être des tremplins vers une recherche de la seule vérité qui peut sauver de l’enfer : le salut par Jésus-Christ.