La résurrection de Jésus : un Dieu qui nous échappe (Marc 16.1-8)

Extrait Texte de prédication

Ce message a été préparé pour le culte de Pâques 2015, culte au cours duquel nous devions baptiser un jeune adulte de l’Église. Je voulais que la prédication soit pertinente à la fois par rapport à Pâques et au baptême. Sur le plan de la forme, sachant que le culte serait assez long (baptême et Cène après la prédication), j’ai opté pour une prédication un peu plus courte qu’à l’habitude.

Jeune pasteure, c’était ma première prédication de Pâques, et le choix du texte n’a pas été si simple. J’ai fini par choisir le texte de l’Évangile proposé par la liste de lecture de la Ligue, Marc 16.1-8. Ce texte est très frappant, car la fin de celui-ci n’est pas vraiment définie : des hésitations existent entre un texte qui s’arrête au verset 8, une conclusion courte et une conclusion longue, ces deux conclusions étant souvent entre parenthèses dans nos Bibles. Le silence après le verset 8 m’a paru très percutant, comme s’il appelait une réponse du lecteur : « Et toi ? ». Du coup, j’ai préféré résister à la tentation de combler ce silence avec les récits des autres évangiles, pour essayer de transmettre en prédication ce silence/interpellation que j’entendais dans le texte de Marc.

Pendant l’étude du texte, j’ai été très frappée par quelques éléments, que j’ai essayé ensuite de transmettre lors de la prédication :

  • les détails concrets du récit (indications de temps, de couleur, de mouvement) ;
  • le vocabulaire de la vision, du regard, qui met en relief le fait que les femmes ne voient pas ce qu’elles s’attendaient à voir ;
  • le contraste qui oppose les verbes de mouvement concernant les femmes et l’homme assis, et le fait que, dans ce texte, les femmes font tout sauf accomplir la mission d’aller et de dire, ce qui souligne le besoin de « digérer » la nouvelle avant de faire quoi que ce soit ;
  • la force des sentiments exprimés (bouleversement, trouble, forte crainte...) ;
  • la sobriété du récit de la résurrection : l’homme en blanc dit que Jésus était mort et qu’il s’est réveillé comme il parlerait d’une sieste ! Le côté extraordinaire de la résurrection est à lire dans la réaction des femmes, qui passent de la routine du deuil à la panique.

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La résurrection de Jésus : un Dieu qui nous échappe (Marc 16.1-8)

Introduction

Le récit qui termine l’Évangile de Marc nous laisse sur notre faim : pas de corps, pas d’explication sur la résurrection, pas de rencontre avec le ressuscité, juste quelques femmes et un homme, une consigne qui n’est même pas mise en œuvre. La fin de cet évangile est abrupte : les femmes n’ont rien fait car elles avaient peur, et nous restons comme en suspens, au point que très tôt dans l’histoire de l’Église, il y a eu la tentation de donner une vraie fin, en ajoutant une conclusion rassurante. Pourtant, l’originalité de Marc, qui s’arrête plus tôt que les autres évangélistes, a le mérite de nous plonger dans l’intensité de ce qui s’est passé et de faire résonner encore jusqu’à aujourd’hui l’interpellation de ce matin de Pâques.

Un choc qui déchire l’ordinaire

Pour décrire cet événement indescriptible, Marc choisit de nous montrer la scène du point de vue des femmes qui découvrent le tombeau vide. Il prend le temps de nous décrire leur état d’esprit : malgré leur chagrin après le supplice et la mort du Maître, elles s’affairent pour achever l’enterrement. Après la crucifixion, elles ont repéré dans quel caveau on plaçait le corps de Jésus mort et, dès que le sabbat, jour férié, est passé, elles achètent les huiles nécessaires pour parfumer le mort, et éviter qu’il ne sente trop. Le lendemain matin, elles partent dès le lever du soleil vers la tombe, pour ne pas perdre de temps. Avec bon sens, elles réfléchissent en chemin aux détails pratiques, et là, mince ! Elles se rendent compte qu’elles n’ont pas pensé à tout : la grande pierre qui ferme le caveau est trop lourde pour qu’elles puissent la déloger. Espérant trouver quelqu’un sur place, un gardien, un soldat, un visiteur, elles continuent leur route.

En arrivant, c’est étrange, la pierre est déjà roulée. Bon, elles entrent et elles trouvent dans la petite entrée du caveau un jeune homme, rayonnant, qui les fait presque sursauter de surprise et de crainte : qui est cet homme ? Que fait-il ici ? Se seraient-elles trompées de tombeau ? Le jeune homme les rassure : c’est bien la tombe de Jésus de Nazareth, crucifié le vendredi précédent. Mais, après les avoir rassurées, il les jette dans la confusion : Jésus n’est plus là, oui il s’est levé, il est parti et il laisse un message à transmettre aux apôtres : rendez-vous en Galilée. Prises de panique, les femmes s’enfuient au plus vite, et s’arrêtent, grelottantes, hébétées, en essayant d’encaisser le choc de cette nouvelle.

En décrivant la scène du point de vue des femmes, Marc évite le surnaturel, le merveilleux, le glorieux, même. Tout est ordinaire, et le tombeau vide apparaît presque comme un accident, une déviation en cours de route : ah non, vous ne pouvez pas embaumer le corps, il n’est pas là ! Le messager ne prend pas particulièrement de pincettes, il n’explique rien, simplement « Jésus n’est plus là et voici où vous pouvez le trouver ». La résurrection, flash de vie divine qui vient déchirer la mort et la fatalité, la résurrection n’est pas donnée à voir, elle n’est pas décrite, il n’y a pas de mots pour rendre compte d’un tel chamboulement.

Notre seule échelle pour mesurer l’ampleur de ce qui s’est passé, c’est la réaction des femmes. Ce sont des femmes de bon sens, des femmes pratiques qui en ont vu et qui ne se laissent pas facilement impressionner : elles ont suivi Jésus, elles l’ont vu agoniser sur la croix, elles ont l’habitude de s’occuper des cadavres parfois abîmés. Pourtant, là, elles sont terrifiées. Ter-ri-fiées ! Le tombeau vide, c’est l’écroulement de leurs certitudes, de leurs habitudes, de ce qui est le plus sûr dans notre vie, le plus universel : nous mourrons tous un jour. Cette certitude est ébranlée : la mort n’a pas eu le dernier mot, et Jésus en est sorti. Plus elles y pensent, plus elles ont le vertige devant ce tombeau vide, trace en creux de l’intervention du Dieu vivant qui déchire l’horizon, qui franchit les frontières de l’ordinaire : Jésus s’est réveillé, la vie de Dieu a triomphé de la mort.

Ce matin-là, tout est pareil, mais tout est différent. Nouveau jour, nouvelle semaine, nouvelle ère : dans le quotidien, la vie de Dieu a fait irruption.

Où voir Jésus ? L’invitation à se mettre en route

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