De la matière qui pense ?

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De la matière qui pense ?

Quand les gens qui me connaissent comme chercheur en neurosciences découvrent que je suis chrétien, ils sont parfois surpris. « Mais tenant compte de tout ce qui est connu du cerveau, disent-ils, comment pouvez-vous continuer à croire toutes ces choses traditionnelles ? » Presque toujours il s’avère que leur raison se focalise sur le fait que nos pensées et actions dépendent d’un objet matériel, le cerveau, et ils supposent que ceci est incompatible avec les croyances chrétiennes en une âme et en la vie après la mort.

Ma conviction est qu’ils ont raison pour ce qui concerne la dépendance de la pensée par rapport à un objet matériel. Effectivement, toute notre expérience consciente – notre volonté, nos émotions et notre réflexion intellectuelle, en fait toute notre vie intérieure et tous nos actes volontaires – dépendent du fonctionnement du cerveau. Mais comment la vie mentale peut-elle dépendre d'une chose physique ? La plupart des philosophes, même les matérialistes, avouent que ceci est mystérieux – on l’appelle le « problème de la conscience » ou le « problème corps-esprit ». C’est un mystère, mais on ne peut guère le nier.

Vers 400 ans avant JC déjà, Hippocrate a écrit :

« Les hommes devraient savoir que du cerveau, et du cerveau seulement, viennent nos plaisirs, nos joies, nos rires et nos larmes. C’est grâce à lui, en particulier, que nous pensons, voyons, entendons et faisons la différence entre le beau et le laid, le bien et le mal, l’agréable et le désagréable. Le cerveau est le messager de la conscience. » (Hippocrate, La Maladie Sacrée, 25, XVII).

Hippocrate déduisait cette affirmation forte de ses observations de patients ayant subi des lésions du cerveau, et l’étude des conséquences de telles lésions est encore une source importante de notre compréhension du cerveau.

Ainsi, l’observation de patients cérébro-lésés a permis de montrer, dès le 19e siècle, que les différentes fonctions de notre cerveau sont localisées dans différentes parties du cerveau. Par exemple, le neurologue français Paul Broca a décrit en 1861 le cas d’un patient qui ne pouvait prononcer d'autres syllabes que « tan ». Il comprenait pourtant sans problème ce qu'on lui disait. À la mort du patient, Broca a découvert qu’il y avait une lésion dans une partie du lobe frontal gauche, et il en a déduit que la production du langage devait être intimement liée à cette région du cerveau. En étudiant d’autres patients, les neurologues ont pu montrer que chaque région du cerveau joue un rôle spécifique (Figure 1). Par exemple, la partie postérieure du cortex cérébral s’occupe de la vision. Elle est divisée en sous-régions qui en gèrent les différents aspects : une sous-région pour l’analyse des couleurs, une autre pour le mouvement visuel, et ainsi de suite. Une certaine partie du cortex cérébral est impliquée dans l’audition, une autre dans la sensibilité tactile, une autre dans la motricité, et d’autres encore pour la planification etc.

 Figure 1. Vue depuis la droite du cortex cérébral humain, montrant les régions chargées de différentes fonctions. Entre autres sont montrés le cortex orbito-frontal*, très impliqué dans la maîtrise de soi, et une région, à la jonction entre les lobes pariétaux et temporaux, dont la stimulation peut provoquer une expérience extracorporelle.


Étude de l’activité cérébrale

Notre compréhension du cerveau s'est énormément enrichie avec le développement de techniques nous permettant d’enregistrer l’activité électrique du cerveau humain conscient. Depuis plus d’un demi-siècle, nous posons  des électrodes posées sur le cuir chevelu, mais ce n’est que récemment que l’utilisation de nombreuses électrodes couplées à un ordinateur a permis une localisation relativement satisfaisante de l’origine de l’activité enregistrée. Une localisation encore meilleure est devenue possible, depuis deux décennies, grâce aux nouvelles techniques d’imagerie. L'une d’elles s’appelle la tomographie par émission de positrons. Elle implique l’injection intravasculaire d’une substance radioactive qui marque les régions les plus actives du cerveau. Une autre est l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, qui donne une information similaire, sans nécessiter de marqueur radioactif. Par ces méthodes on peut établir...

Auteurs
Peter CLARKE

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