L’expérience spirituelle d’un ado

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Je loue Dieu de ce qu’il prête son attention à mon enfant. Je le vois bien, chaque instant compliqué dans son parcours me permet de graver de longs souvenirs sur la fidélité de Dieu dans les moments difficiles.

AdolescentLa nuit approche et nous savons qu’elle sera encore longue pour tous. Nous prenons le temps de prier ensemble. Ce soir, je propose de rester car Marie est vraiment fatiguée. Marceau me demande de lire un psaume.

Avez-vous déjà constaté à quel point nos lectures bibliques sont plus attentives à ce qui est écrit quand nous sommes au cœur d’une épreuve ?  Et puis, dans nos douleurs, il nous arrive de dire au Seigneur : « Que ta volonté soit faite ! » Il y a quelques années, j’avais peur de dire ces mots. Je me disais qu’après tout, je n’y étais pas prêt. En réalité, l’image que je me faisais de Dieu n’était pas très juste. Dans une situation comme celle-ci, j'étais trop attaché au fait que Dieu pouvait décider de reprendre la vie de mon fils. Mais j’ai changé de regard à propos de Dieu. Surtout dans le domaine de la mort et de la vie.

Marceau et moi prions ensemble en ce début de soirée. Je lis un psaume. Nous avons une petite technique entre nous. Comme Marceau est à nouveau très faible et ne peut pas beaucoup parler, il me dit « Psaumes » pour que je lise un passage biblique et avec son doigt, il m’indique qui de nous priera. C’est notre code.

Il tient à prendre sa place dans la prière. Je comprends qu’il prie en lui-même, et pour savoir quand il a terminé, il tape deux fois avec sa main droite sur le matelas.

Julien Green a écrit : « Un homme peut transformer sa chambre en paradis ou en enfer, simplement par les pensées qu’il y logera. » Je vois bien que Marceau a choisi de faire de ce lieu de douleur un paradis au sein duquel le Seigneur est présent.

Marceau, avec sa foi, entretient des pensées positives. Et qui dit foi, dit confiance en Dieu. Moi, dans ma chambre intérieure, j’ai choisi d’inviter Dieu également. Il nous propose toujours un coin de paradis. C’est son amour pour nous qui produit cela en nous.

Nous pensons à prier pour l’équipe de nuit, car le relais vient de se faire. Dieu allait encore nous parler ce soir-là. Sa présence nous fait tellement de bien. Comme le dit l’un de mes auteurs préférés, François Garagnon, nous avons reçu un « Clin Dieu » ce soir-là ; alors je veux le partager avec vous.

Notre arrivée dans cette chambre ne nous met pas à l’aise, et le service y est moins disponible qu’en réanimation. L’équipe nous a prévenus. Alors, il faut accepter et faire avec. Après tout, ces soignants ont tellement de travail. De plus, avec la pandémie qui dure depuis des mois, le personnel est restreint. Quand l’infirmière de garde entre dans la chambre pour vérifier si tout va bien, elle nous rassure : « Il y a encore quelques semaines, je travaillais en réanimation. J’ai l’habitude avec ce genre de situation, sois rassuré Marceau, je vais prendre soin de toi. »

Vous penserez tout ce que vous voudrez, mais, pour nous, c’est une fois de plus ce psaume qui revient : « L’Éternel le soutient sur son lit de douleur. » Beaucoup de personnes peuvent appeler ça « hasard », mais nous, on l’appelle « Clin Dieu ».

Cette nuit, nous avons avec nous une personne qui peut comprendre le chemin de douleur de notre fils. On savait que si on l’appelait, elle viendrait de suite avec toute son expérience. Voilà un signe de plus que Dieu prend soin de notre enfant depuis le début. Il est présent dans notre épreuve.

Notre ado s’endort, très fatigué après une journée très mouvementée. Malheureusement les douleurs deviennent de plus en plus insupportables. Elles sont maintenant encore plus fortes et il leur donne une note de 12/10 sur l’échelle de douleur.

Son cœur bat très vite et il est surveillé de près. Il est jeune et sportif, mais son cœur travaille beaucoup depuis quelques jours et particulièrement aujourd’hui. L’équipe médicale se montre vigilante.

Je lui tiens la main, je reste silencieux, mais rien n'y fait. Il active l’injection de morphine quand il en éprouve le besoin. La douleur ne diminue pas. Il ne peut même pas crier sa douleur. Les larmes coulent le long de son visage et moi, je me sens tellement impuissant. Ces instants sont horribles à vivre.

Je lis alors les onze premiers versets du Psaumes 143. En voici quelques extraits :

« Seigneur, écoute ma prière, sois attentif quand je crie vers toi ! Toi qui es fidèle et juste, réponds-moi ! Je suis ton serviteur, ne me fais pas de procès, car personne n’est juste devant toi. […] Je suis découragé, j’ai perdu tout espoir. Je me souviens du passé, je me redis tout ce que tu as fait, je réfléchis à tes actions. Je lève les mains vers toi, je suis devant toi comme une terre qui manque d’eau. Vite, réponds-moi, Seigneur, je suis complétement découragé ! Ne me cache pas ton visage, sinon, je vais ressembler à ceux qui descendent dans la tombe. Dès le matin, montre-moi ton amour, car j’ai confiance en toi. Fais-moi connaître le chemin à suivre, car je me tourne vers toi. […] C’est toi qui es mon Dieu, apprends-moi à faire ce qui te plaît. Que ton esprit me guide avec bonté. […] Seigneur, rends- moi la vie pour montrer ta gloire ! Toi qui es fidèle, tu me tireras du malheur. »

À la fin de la lecture, Marceau a les joues trempées de larmes. Il me dit « ma prière » avec le peu de force qu’il lui reste. Il me fait ainsi comprendre que cette prière est également la sienne. Il me dit alors : « Encore fin. » Je pense qu’il veut manger, mais il répète : « Encore Bible fin. » Je comprends alors qu’il me demande de relire la fin du passage, ce que je fais :

« C’est toi qui es mon Dieu, apprends-moi à faire ce qui te plaît. Que ton esprit me guide avec bonté sur une terre sans obstacle ! Seigneur, rends-moi la vie pour montrer ta gloire ! Toi qui es fidèle, tu me tireras du malheur. »

Après cette relecture, Marceau me dit faiblement encore une fois : « Ma prière. » Ce jeune gamin de quinze ans me fait comprendre qu’il veut continuer à vivre pour faire la volonté de Dieu : une belle leçon de foi et de fidélité au Seigneur malgré les circonstances qu’il traverse. Cette expérience reste formidable.

Les douleurs ont continué toute la nuit. L'équipe médicale se demande s’il ne va pas retourner en réanimation. Nous continuons à compter sur Dieu même si ça part dans tous les sens au niveau des émotions. Notre fils arrive à dire en lui-même : « Au-delà des douleurs, Père, je te loue. »

Auteurs
Michaël DRUART

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