Il est intéressant de noter que, généralement, un secret de famille est un secret de polichinelle.
Les uns le connaissent, alors que les autres, qui le connaissent aussi, croient que les premiers l’ignorent.
Ne tardez pas
Dans mon expérience, je remarque que les enfants se doutent toujours de quelque chose... S’ils n’en parlent pas, c’est qu’ils pensent que c’est un sujet trop douloureux pour le ou les parents et qu’il vaut mieux ne pas l’aborder, pour ne pas leur faire du mal.
Si vous n’avez jamais échangé sur ce sujet avec votre fille, il est grand temps de le lui proposer. Les relations humaines sont indispensables à la vie. Chaque relation qui se rompt, qui se brise, est bien sûr douloureuse, mais plus que cela, elle appauvrit, elle ôte une part de vie. Souvent même, une rupture reste une plaie ouverte qui empêche l’approche, la construction d’autres relations. Elle provoque comme une sorte de paralysie affective.
Les enjeux
Ce qui permet de renouer, voire d’ouvrir une brèche dans l’enfermement, c’est la parole. La parole ouvre à la vie, la parole dite, la parole partagée et réfléchie. La parole conduit à reconstruire les liens brisés, elle est porteuse de vie.
La personne concernée peut ne pas vouloir de suite aborder le sujet. La peur de savoir peut être aussi forte que la peur de dire.
Dans votre cas, il se peut que vous soyez surpris de voir que contrairement à ce que vous auriez pu penser, l’accès à la vérité va renforcer vos liens avec votre fille... peut- être pas dans l’immédiat, c’est vrai. Elle aura besoin d’un certain temps pour « faire elle aussi le deuil » de ce qu’elle a entendu, des conséquences engendrées par ce qu’elle a découvert, à son niveau, pour sa vie, qui ont, sans qu’elle le sache, influencé ses choix.
Pas n’importe quand ni n’importe comment
La connaissance de la vérité libère, mais pas sans certaines douleurs. Souvenez-vous que la manière de dire « cette vérité » est tout aussi importante que la vérité elle-même. « Je dis ce que je pense », disent de nombreuses personnes. Ah oui ? Est-ce que la personne qui va recevoir cette information est prête pour cela ? Est-ce qu’elle tient à savoir ce que vous avez à dire ? Est-ce que l’information qui vous brûle la langue va effectivement permettre une meilleure compréhension et une éventuelle reconstruction des relations brisées ? Est-ce que vous informez, ou est-ce que vous portez un jugement qui va faire per- durer, amplifier et accentuer la division ? Parler ne veut pas forcément dire n’importe comment. Venir en juge ou en complice reviendrait à entrer dans des rapports de force qui ne feraient qu’envenimer la situation.
Respectez votre fille
Demandez à votre fille si elle s’est aperçue de quelque chose, si elle se rend compte des divisions familiales, si elle se doute des origines du secret qui a brisé les liens familiaux. Puis, dites-lui que vous seriez prête à en parler... et que, dès qu’elle le souhaite, vous vous tenez à sa disposition. Elle se sentira respectée et vous aurez, à ce niveau déjà, renforcé les liens. Le jour où elle sera prête, elle aura aussi plus de force psychique pour affronter ce qu’elle aura à savoir.
Vous êtes une personne d’ouverture, une personne courageuse et je vous félicite.